Wiki Guy de Rambaud
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Jeanne Goussard de Mayolle, née Le Clerc.

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Château du Haut-Brizay. Goussard de Mayolle fait du domaine dont il est le régisseur une ferme expérimentale. Le premier château de Brizay est construit par les premiers Chourses-Brisay.

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Une Française chez les sauvages : le camp des Navajos.

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Une Française chez les sauvages: Jeanne Goussard de Mayolle, édité par Maison Alfred Mame et fils.

Jeanne Le Clerc, Marie Frédérique, épouse Alfred Goussard de Mayolle, est née le 30 août 1847, 9, rue Buffon, à Tours.


Jeanne Le Clerc est la fille d'un membre de la Famille Le Clerc, des nobles lorrains venus s'installer en Touraine. Son père, Frédéric Le Clerc est botaniste, docteur en médecine et professeur à l’École de médecine de Tours, médecin en chef de l'Hospice général de Tours, et de plusieurs ouvrages de médecine. Après un voyage en Amérique, comme son cousin germain, Félix Augustin Leclerc de Pulligny, il est l'auteur d'un très intéressant ouvrage : Le Texas et sa Révolution.

Jeanne Le Clerc passe sa jeunesse en grande partie à Tours. Elle se marie avec un ingénieur, Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard Goussard de Mayolle -1832 - 1907), ancien élève de l'École Centrale des Arts et Manufactures, promotion de 1851[1]. Il est le petit-fils de Gaétan Camille Thomas Paroletti, général, chevalier de Saint-Louis, officier de la Légion d'honneur et chevalier de Mayolle, d'où son nom. Il est ingénieur-agriculteur (1865 - 1879) au château du Haut-Brizay et Président du Comice agricole de Chinon.

Son mari est chargé de prospection minière, aux confins du Colorado et du Nouveau-Mexique, mais il n'est pas qu'ingénieur. On lui donne et vend des actions de ces mines[2]. Jeanne Goussard de Mayolle accompagne son mari. Ils s'équipent à New York pour leur expédition et envoie leurs colis à la gare de Durango, dans le Colorado. Ils visitent le Canada. Les chutes du Niagara ne les enthousiasment pas.

Jeanne Goussard de Mayolle s'arrête brièvement avec son mari à Chicago. Elle est surprise par l'étalement de la ville et la compare avec une créature surnaturelle aux bras immenses[3]. Il semble que ce voyage a lieu dans les années 1880 ou au début des années 90, avant 1893, parce qu'elle dit qu'ils ont visité Chicago avant l'Exposition universelle de 1893[4]. Peut-être en 1892, car son père est décédé à Bloombield en 1891. Il a peut-être laissé à son gendre des terrains à prospecter.

Les Goussard et leur secrétaire traversent les grandes plaines, passent par Pueblo, La Veta Pass, Durango, au Colorado, et après un voyage à cheval s'installent à Bloomfield, au nord du Nouveau-Mexique[5], où est décédé son père, Frédéric Le Clerc, en 1891.

Les descriptions qu'elle fait de Pueblo ou de Bloomfield sont caricaturales. Elle n'est pas très impressionnée par la culture des Amérindiens. Pour elle les vrais sauvages sont plutôt les Américains du sud-ouest des Etats-Unis, ce qui est un peu exagéré, car on a d'autres documents sur eux et Bloomfield à cette époque. Son récit offre cependant un intéressant témoignage sur les Indiens Navajos.

Son livre est publié en 1897 à Tours, chez Mame, mais n'est jamais traduit en anglais, comme celui de son père, Texas and its Revolution. Françoise Lapeyre, dans son ouvrage Le Roman des voyageuses françaises (1800-1900) s'enthousiasme :

elle est la première Française à descendre l'Animas, blessée par un bison, doit lutter contre les Indiens à l'arme à feu.

Elle fait des conférences et l'une d'elle : Un voyage chez les Indiens du Nouveau-Mexique est reproduite dans le Bulletin de la Société normande de géographie (tome 20, 1898, p. 85-108). Elle figure aussi dans French travellers in the United States, 1765-1932 : a bibliography, de Frank Monaghan. L'auteur nous dit qu'elle accompagne son mari dans un rude voyage de reconnaissance des mines du Colorado et du Nouveau-Mexique.

En 1896 les époux Goussard de Mayolle sont en procès contre les époux de Rambaud, sa soeur et son mari, mes trisaïeux, pour de sordides histoires d'héritage.

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SA FAMILLE, SA JEUNESSE[]

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Chrétienne

Statue de Chrestienne Le Clerc du Vivier (Anguier. Musée du Louvre, Aile Richelieu - Rez-de-chaussée - Section 18a).

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Acte de naissance de Jeanne Le Clerc.

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La maison natale de Jeanne Le Clerc.

Son père, Frédéric Le Clerc, un membre de la Famille Le Clerc, des nobles lorrains venus s'installer en Touraine, se marie avec Marie-Eugénie Meusnier (1824-1894), le 14 novembre 1842, à Tours[6]. Elle est la petite-fille du révolotionnaire Simon Meusnier-Badger (1759 - 1833), gendre d’Humfry Badger (1719-1792), un Anglais, qui, avec son frère John Badger (1712-1800) à Lyon, permettent à l’industrie de la soie française de concurrencer les Anglais.

Pierre Durand (1755 - 1835), le grand-père maternel de sa femme, est procureur du roi avant 1789, mais il est élu maire de Saint-Épain et député du Tiers à Chinon, comme le grand-père maternel de Frédéric. Marie-Eugénie Meusnier est une très jolie jeune fille. Les parents de Frédéric sont présents à son mariage et consentants. Pierre Bretonneau, qui a élevé son père, est bien entendu son premier témoin.

Le 22 juillet 1845 naît la fille aînée de Frédéric, Marguerite Le Clerc 15, rue de Buffon. Mais sa seconde fille, Jeanne Le Clerc, vient au jour le 1er septembre 1847, 23, rue Buffon. Frédéric Le Clerc a encore déménagé. Dans une lettre de 1849 à son ami Bretonneau, adressée au château de Palluau, Pierre Jean de Béranger envoie ses bonnes amitiés à Madame Leclerc et autres membres de la famille.

Jeanne a une soeur et un frère :

  • Marguerite Le Clerc (1845-1820), sa soeur aînée, se marie le 2 mars 1868 avec Ernest de Rambaud (1819-1899), écuyer, polytechnicien et diplômé de l'École d'application du Corps Royal d'État-major, colonel de l'état-major, officier de l'ordre impérial de la Légion d'honneur, chevalier Grand Croix de l'ordre royal et militaire sarde des Saints Maurice et Lazare, l’un des rares Français décoré de la médaille de Crimée anglaise. Leur mariage fait l'objet d'un article d'une page entière dans Le calendrier de la noblesse de Touraine de 1868, de l’historien Carré de Busseroles. Il est le petit-fils d'Agathe de Rambaud, qui a élevé Louis XVII. La dot est de 50.000 francs. Ils héritent du château de La Hauteville venant de la famille du beau-père d’Ernest, les comtes d’Allonville et y vivent après la guerre de 70. Ernest de Rambaud a 26 ans de plus que sa femme et est plus âgé que sa belle-mère, mais un portrait de lui à cette époque nous montre qu’il n’est en rien sénile comme le docteur Bretonneau.
  • Maurice Le Clerc (1864-1934), son frère, naît le 18 août 1864. Maurice Le Clerc va s'établir en Indochine, où il est Contrôleur Civil. Son fils Luc a deux filles et un fils Marc. Marc Le Clerc, maintenant a trois enfants. Frédéric Le Clerc porte le même prénom que son trisaïeul. Il est polytechnicien comme Ernest de Rambaud et Jean Leclerc de Pulligny. Il dirige actuellement la propriété familiale le Château La Tour de By, dans le Médoc. Il est le frère d'Emmanuel, agronome, actuellement en poste pour la Commission Européenne, à Zagreb ; et d'Aude mariée à R. P., chercheur en neuro-sciences à Bâle.

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SON MARI[]

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Ingénieur et inventeur[]

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École Centrale des Arts et Manufactures.

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Etudiants de l'École Centrale des Arts et Manufactures.

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33, boulevard Saint-Martin.

Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard Goussard de Mayolle est ancien élève de l'École Centrale des Arts et Manufactures. Vingt ans après sa création, en 1829, les jeunes ingénieurs issus de Centrale occupent des places de premier plan dans l'industrie où ils se font remarquer par leur sens de l'innovation, leur esprit d'entreprise et leur compétence de gestionnaires. Goussard de Mayolles fait partie de la promotion de 1851[7]. Il est décoré des palmes académiques.

Pendant bien des années, de 1851 à 1865, il vend ses inventions.

La cession enregistrée au secrétariat de la préfecture du département de la Seine, le 2 juillet 1860, faite, suivant acte en date du 15 décembre 1859, au sieur Goussard (Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard), ingénieur, demeurant à Paris, rue Notre-Dame-de-Nazareth, n° 9, et à la demoiselle Briard (Caroline-Émilie-Célestine), propriétaire, demeurant à Paris, rue Cadet, n° 8, par le sieur Lesnard, de partie de ses droits au brevet d'invention de quinze ans qu'il a pris, le 26 octobre 1853, pour un système de forces motrices, par le double emploi de la puissance des gaz comprimés et de la puissance de la pesanteur, combinés au moyen d'un appareil composé d'une machine rectiligne à piston et d'une machine rotative conjointement

Pour Michael Henry, du n° 84, rue Fleet, dans la ville de Londres, agent de brevets, pour l'invention visant à l'amélioration des fours dont la combustion est effectuée pour obtenir des gaz ou des produits gazeux destinés à être utilement appliquée. Agent à l'étranger de Edouard Alphonse Jardin et Alfred Charles Marie Célestin Edgard Goussard, du n° 33, boulevard Saint-Martin, à Paris, selon The London Gazette, 1861.

Goussard de Mayolle est membre de la Commission supérieure, nommée en 1861, sur les chemins de fer en milieu rural.

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Ingénieur-agriculteur (1865 - 1879)[]

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Le domaine du Haut-Brizay[]

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Carolina de Sparre.

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Château du Haut-Brizay. Le premier château de Brizay est construit par les premiers Chourses-Brisay.

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Coupe de l'intérieur des bergeries de Grobois.

Le général-comte Joseph de Sparre (1780 - 1845), grand militaire ayant participé aux campagnes napoléoniennes se retire en Touraine. En 1825, il achète le château et la ferme du Haut-Brizay près de l’Ile-Bouchard et devient conseiller général du département. Ses terres atteignent deux cents hectares qu’il exploite selon les principes de l’agronome Mathieu de Dombasle[8]. Cette propriété est, avec le château, tout ce qui reste d'un ancien fief seigneurial de la famille de Maillé.

Entre 1845, date de sa mort et 1865, une grande partie des terres retombe en friche. En 1865, la comtesse Caroline de Sparre, née Naldi (1802 - 1876), avant son mariage une des plus importantes cantatrices de sa génération, fait appel au dévouement du mari de Jeanne, Goussard de Mayolles, et verbalement lui confie, pour neuf ans, la direction de sa propriété qu'il doit faire valoir à ses risques et périls.

Le Haut-Brizay est situé non loin de l’Île-Bouchard, sur la rive gauche de la Vienne, à une certaine distance de la rivière. Le premier soin du nouvel administrateur est de faire réédifier les bâtiments de manière à pouvoir y installer un cheptel suffisant. C'est dans la ferme du château, derrière les bâtiments de service, qu'est installé le laboratoire de chimie de Goussard de Mayolles. Ancien élève de l’École centrale, d'ingénieur civil devenu cultivateur, il résout d'appliquer à la solution des problèmes de la culture le fruit de ses laborieuses études et prend pour base de son entreprise agricole les enseignements que lui fournisse la chimie.

Au fléau de l'occupation étrangère vient se joindre cette affreuse invasion d'arthrite qui accompagne la marche des armées et qui enlève 31 sujets à l'étable du Haut-Brizay.

En 1872, il écrit Études sur les engrais, dans Journal de l'agriculture de la ferme et des maisons de campagnes de la zootechnie, de la viticulture, de l'horticulture, de l'économie rurale et des intérêts de la propriété.

Goussard de Mayolle écrit : Moissonneuses, faucheuses et râteaux à cheval en 1873 :

Au Brizay les gerbes sont liées avec les liens automatiques de Lapparent en cordes goudronnées, munies d'un petit appareil en bois et fil de fer, grâce auquel le liage est instantané, et peut être effectué par les personnes les moins habituées à ce travail.

Les gerbes sont battues par une machine Gérard, de Vierzon, mue par la vapeur, les grains presque toujours vendus comme blés de semence, et généralement à des prix très élevés, car M. Goussard de Mayolle est aussi bon commerçant que bon producteur.

L'exploitation des animaux est aussi bien conduite au Brizay que le travail de la terre et la récolte des produits. Cependant, les efforts semblent y être principalement concentrés sur les races ovine et porcine. Une épidémie d'arthrite est venue arrêter brusquement le développement de la vacherie, premier sujet des soins de M. Goussard de Mayolle.

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La ferme expérimentale de Grobois (1865 - 1879)[]

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Bergerie ; ferme expérimentale, Haut-Brizay). Grobois, ferme située communes de Brizay, Theneuil et Parçay

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A partir de 1862, la bergerie de Grobois est rattachée à celle du Haut-Brizay[9].

Dès 1865, Goussard de Mayolles achète Grobois, terre réputée infertile, et expérimente une nouvelle méthode de culture. La grande nouveauté est de parvenir la première année, sans bétail, à créer le premier stock de litière et de fourrage[10].

Goussard de Mayolle écrit : Moissonneuses, faucheuses et râteaux à cheval en 1873 :

A de rares exceptions, il fallut sacrifier entièrement un magnifique troupeau, produit de croisements systématiques effectués dans le but de grandir la race parthenaise, et de développer ses aptitudes dans le sens de la boucherie. Mais le président du comice de Chinon n’est pas de ceux qui se découragent, et en élevant tout ce qu'il produit de veaux mâles ou femelles, il arrivera à repeupler ses étables.

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Les semences, le Galland[]

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Blé Galland ou Pétanielle Blanche.

Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard Goussard de Mayolle est membre de Sciences, arts et belle lettres du département d'Indre-et-Loire, le 1er janvier 1869. Il est cité plusieurs fois en 1869.

Goussard de Mayolles présente quelques tiges d'avoine de Sibérie, et de blé hybride Galland semé en mars. Ces céréales atteignent une croissance extraordinaire et promettent un rendement considérable. La qualité du blé Galland peut-elle soutenir la comparaison avec celle des autres sortes cultivées dans notre région ? Goussard s'appuyant des analyses chimiques et sur son expérience personnelle, le pense sans hésitation, mais il sera bon de se défier des résistances de la meunerie, intéressée à repousser des espèces aussi productives.

Le Bulletin trimestriel de la Société d'agriculture de Joigny, la Société d'agriculture, sciences et arts de Poligny ou la Revue agricole, industrielle et littéraire du Nord nous disent qu'il présente cette semence en tant que président de section au comice agricole de Chinon en 1869. Il est membre de la Société d'agriculture de Tours en 1870.

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Les concours - Mettray[]

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La colonie pénitentiaire agricole de Mettray.

Goussard de Mayolles introduit la moissonneuse en 1867[11].

Goussard de Mayolles, Ingénieur-agriculteur, président du Comice agricole de Chinon, organise un concours international de moissonneuses et de faucheusestirées par des chevaux du 24 juillet au 3 août 1873[12], puis un autre à Mettray en 1874.

Société d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres du département d'Indre-et-Loire. Concours international de moissonneuses et de faucheuses-moissonneuses à Mettray en 1874, rapports présentés par M. Goussard de Mayolle,... et Armand Ferré – 1874.

Réponse de MM. D.-M. Osborne & Co. au rapport de M. Goussard de Mayolle sur son concours de moissonneuses et de faucheuses-moissonneuse, à Mettray, en 1874, par E. Cavelier (1875.

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Après sa démission (1879)[]

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Le château actuel du Haut-Brizay est aménagé en 1895.

Carolina de Sparre décède dans son château de Touraine le 26 décembre 1876.

Au château du Haut-Brizay, le 15 juin 1879, Goussard de Mayolle, écrit : A messieurs les membres du Comice agricole de Chinon pour donner sa démission. (Signé : Goussard de Mayolle, Daviau, Grosset-Pallec).

Malgré le succès de sa méthode, l'activité semble avoir décliné après lui[13].

En 1883, la propriété passe entre les mains du baron Roger Poissalolle de Nanteuil de La Norville[14], un botaniste français.

En juillet 1875, Goussard de Mayolle dirige une entreprise qui exporte de le viande congelée, spécialement achetée en Angleterre...[15].

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Son décès[]

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Les Frères de Saint-Jean de Dieu à Saint-Barthélémy

Le Bulletin des séances de la Société royale et centrale d'agriculture nous dit que :

M. le Secrétaire perpétuel, j'ai le regret de vous faire part de la mort d'un de nos correspondants Nationaux : M. Goussard de Mayollle, qui, depuis de longues années, appartenait à la Section de mécanique agricole et des irrigations[16].

Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard Goussard de Mayolle est décédée le 31 octobre 1907, chez les Frères de Saint-Jean de Dieu à Saint-Barthélémy, près Marseille.

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LES VOYAGES DE SA FAMILLE EN AMÉRIQUE[]

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Premier séjour de son père en Amérique (1837 - 1838)[]

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Frédéric Le Clerc, son père.

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Texas and its Revolution : El Alamo.

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Premiers billets de banques texans.

En 1837, Frédéric Le Clerc part aux États-Unis, où l'on retrouve sa trace à Cincinnati dans l'Ohio, en juin et juillet 1837, puis à La Nouvelle-Orléans. Bretonneau, qui l'a élevé, regrette qu'il soit parti : Dans l'intérêt de Frédéric, je m'étais obstiné à faire des leçons de clinique. Je n'ai pu le retenir et cet aventureux garçon est maintenant à La Nouvelle Orléans. Il est très inquiet pour sa santé.

Frédéric Le Clerc gagne le Texas en 1838, qui vient d’acquérir son indépendance face au Mexique. Il est le premier visiteur européen. William Kennedy écrit Texas, the Rise, Progress, and Prospects of the Republic of Texas, seulement en 1841, comme le rappelle la toute récente étude de Laura Lyons Mc Lemore, Inventing Texas. Les deux Européens sont fascinés par le Texas. Le Clerc étudie les conséquences de la révolution texane, comme Alexis de Tocqueville s'interroge sur les fondements de la démocratie, dans le nord-est des États-Unis, à la même époque. Alexis de Tocqueville et Leclerc ne se rencontrent pourtant pas dans la vaste Amérique, mais 20 ans plus tard à Saint-Cyr-sur-Loire, où l’ancien ministre s’installe à la fin de sa vie. Il devient le patient et l’ami de Bretonneau.

L'ouvrage de Frédéric Le Clerc contient dans un petit nombre de pages beaucoup de choses intéressantes. Il raconte comment le Texas, peu à peu envahi par des Nord-Américains, finit par se séparer du Mexique. L'Union entame des négociations pour se faire céder cette province qui forme une saillie hors du territoire du Mexique. L'événement ne répond pas à son attente et la Grande-Bretagne se prononce contre l'acquisition du Texas par l'Union. Le nombre des colons augmentant, ils demandent à former un état indépendant. Les Mexicains rejettent cette proposition mais, le pays étant en proie à l'anarchie, ILS ne peuvent empêcher le Texas de proclamer son indépendance le 16 août 1835.

Frédéric Le Clerc, qui nous instruit de ces événements, nous fait connaître aussi les progrès du nouvel état. Ils sont réellement prodigieux. A la fin de 1836, il ne compte pas plus de 70.000 habitants, mais rapidement plus de 250.000. L'agriculture, le commerce, l'organisation de la force publique, y marchent du même pas. La France, les Pays-Bas et la Belgique, reconnaissent son indépendance. La tranquillité intérieure n'est plus troublée au Texas, tandis que le Mexique est encore déchiré par des troubles. Le siège du gouvernement est à Austin, sur le Rio Colorado, qui traverse le milieu de ce pays plein d'avenir.

Frédéric Le Clerc s’intéresse aux faits historiques, à la population et l’économie, mais il étudie aussi la faune, la flore, la géologie du pays... Il fait un portrait tellement idyllique du Texas qu’il donne aux Américains qui le lisent l’envie d’en faire un nouvel état des États-Unis. Il ne tarit pas déloge pour les colons du Texas qu’il appelle les Anglo-Américains. Il s’étonne que si peu de colons aient pu battre le Mexique pays très peuplé et possédant une armée de métier. Par contre, il fait un portrait peu flatteur du général Houston.

Le 22 décembre 1838, Bretonneau annonce à Velpeau : En revenant de la Nouvelle-Orléans chercher ses lettres, mon Texien y a pris la fièvre jaune, et voilà qu'en face de la mort, qu'il a vue de près, les regrets de la famille devenant si vifs que d'un bond il nous arrive, en douze jours de New-York à Bristol....

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Le Texas et sa Révolution[]

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Lettre de Bretonneau à la propriétaire du château de Chenonceau concernant Frédéric Leclerc.

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Pierre Bretonneau.

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Quelques uns des proches de Bretonneau et sa famille.

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Frédéric Leclerc, Le Texas et Sa Révolution. Paris H. Fournier et Ce, 1840 (première édition).

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Le livre de Le Clerc est dédié au Président Mirabeau Bonaparte Lamar.

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Carte du Texas extraite de la grande Carte du Mexique / par A. Brué géographe du roi ; revue, corrigée et considérablement augmentée, d'après des documents récen[t]s et des renseignemen[t]s fournis par Mr le docteur F[rédéri]c Leclerc ; par Ch. Picquet, géographe du roi et de monseigneur le duc d'Orléans ; lith. de Thierry frères.

Bretonneau, ce maître paternel redoute un nouveau départ. Il s'en confie à la comtesse de Villeneuve, la propriétaire du château de Chenonceau :

Mon Texien est à Paris en chair et en os, en âme il rôde sur les bords du golfe du Mexique. Je vois cela avec inquiétude...

Jouant les apprentis psychiatres, Bretonneau conseille à Frédéric Le Clerc, pour se défouler, d'écrire le récit de son voyage. Ce que Frédéric s'emploie à faire. Pierre-Jean de Béranger (1780 - 1857), ami de la famille de Bretonneau, en est enthousiasmé et lui propose de le faire imprimer. Finalement, Armand Trousseau (1801 - 1867) se charge de remettre le manuscrit à Buloz, Directeur de la Revue des Deux Mondes et de La Revue de Paris, avec une lettre de recommandation du poète. Le manus­crit de Frédéric sera imprimé par la Revue de Paris, écrit Armand Trousseau (1801 - 1867) :

c'est un recueil littéraire très estimé. Il aura à retoucher quelques détails un peu trop lâchés, et que le bienveillant critique de la rue Chanoineau n'aurait pas dû laisser passer.

Le manuscrit est imprimé dans La Revue des deux mondes, de mars et avril 1840, puis paraît sous la forme d'un ouvrage intitulé : Le Texas et sa Révolution, dans lequel est décrite la révolution texane livrée par les Texans contre le Mexique en 1836.

Armand Trousseau (1801 - 1867) continue à ironiser dans sa lettre du 15 mars 1840 : Avez-vous lu mon mandement ? Non, Monsei­gneur et vous ? De vous à moi, c'est un peu la réponse qu'on pourrait faire à notre Texien. Et puis le chansonnier, qui ne flatte pas les rois, se relâche un peu de son farouche stoïcisme à l'endroit des médecins qu'il aime :

Lisez-lui ce petit bout de ma lettre avant de la déchirer et il sourira probablement. L'oeuvre de Leclerc était inimpri­mable, d'un décousu qui passait toute idée, et dans un français qui était un peu exotique. Buloz en a confié la révision, augmentation, correction, mutation, transsubstantiation, à l'un des collaborateurs les plus habiles de la revue, qui a fait un travail remarquable, dont la première partie a paru le 1er mars avec la signature de Leclerc et qui fera grand honneur à ce dernier. Je suis sûr que votre ami le poète sera plus content de l'imprimé que du manuscrit. Brûlez ma lettre et n'en dites mot à Leclerc : les enfants crient quand on les débarbouille. Les « mandarins » que nous sommes font trop souvent le même travail secret que celui du collaborateur de Buloz lorsqu'ils inspirent une thèse ou un mémoire !

La lettre n’est pas déchirée et est conservée parmi les archives de la faculté de Médecine de Tours, et les textes manuscrits de Armand Trousseau (1801 - 1867).

Le public tourangeau apprécie cette étude qui est louangée dans le rapport annuel de la Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles Lettres d'Indre-et-Loire :

Un des Etats de nouvelle création, le Texas, province mexicaine qui s'est érigée en république indépendante, a été décrit avec un talent remarquable par l'un de nos compatriotes, qui vous a fait hommage de son travail, M. Frédéric Leclerc, aujourd'hui médecin en chef de l'Hospice.

L'ouvrage de Frédéric Le Clerc n’est pas apprécié qu’en Touraine. Les deux articles sont immédiatement traduits dans le Southern Literary Messenger.

Un livre est édité en 1840. Lacroix-La Renaudière, dans L'Univers, Mexique et Guatemala, écrit que :

C’est un excellent ouvrage plein de recherches curieuses et d'aperçus nouveaux. Un autre critique précise qu’il contient dans un petit nombre de pages beaucoup de choses intéressantes ; il raconte comment le Texas, peu à peu envahi par des Nord-Américains, finit par se séparer du Mexique. L'Union entama des négociations pour se faire céder cette province qui formait une saillie hors du territoire du Mexique ; l'événement ne répondit pas à son attente.

On parle partout de l'excellent travail de Frédéric Leclerc sur Le Texas et sa révolution. On dit qu'il est impossible de réunir en moins de pages plus de faits curieux sur les grands événements dont cette contrée si riche d'avenir a été le théâtre.

Le Texas et sa révolution est dédié au second président de la République du Texas, Mirabeau Bonaparte Lamar. On retrouve dans les archives de Lamar une lettre de Frédéric Le Clerc lui demandant la permission de lui dédier ce livre.

Une carte rare de la république du Texas, est incluse dans son travail. Les notes ayant permis de dessiner la carte viennent de la carte de Brue du Mexique (probablement de l’édition de 1834), qui est corrigée par Leclerc. La carte signale 27 divisions du Texas, y compris la région des Comanches dans le Nord-Ouest. Le Texas est encore réduit au niveau territoire et ne va pas jusqu’au Rio Grande. La carte fourmille de détails inconnus à cette pour cette époque. Le Clerc arrive au Texas au début de l’année 1838. Les notes sur les rues ainsi que les observations sur Galveston, Houston, San Felipe et Bejar ou San Antonio sont très intéressantes. Elles continuent à l’être de nos jours. Texas and Its Revolution, est réédité à Houston, en 1950. Cette traduction, comme les autres éditions, sont très rares et recherchées.

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Le voyage du cousin germain de son père aux États-Unis (1842)[]

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Félix Augustin Leclerc de Pulligny.

Le voyage et les recherches de son cousin germain Frédéric Le Clerc aux États-Unis donne des idées à d'autres membres des sa famille. En 1842, Félix Augustin Leclerc de Pulligny s'embarque pour l'Amérique muni de lettres de recommandations, pour l’Amérique, dont celles de l’ami de la famille François René de Chateaubriand (1768-1848). Il fait de longues escales en Angleterre, en Écosse et en Irlande.

Félix Augustin Leclerc de Pulligny est reçu à la Maison Blanche, par John Tyler (1790-1862), le dixième président des États-Unis d'Amérique. Tyler est l'exemple type des hommes politiques issus des États du Sud. Il est contre un pouvoir fédéral fort et défend le droit des états à décider de leur propre politique en matière de règles électorales, de droits de douane et, bien sûr, d'esclavage[17].

Même si John Tyler est le fils de riches planteurs et Félix, celui d'un comte, les deux hommes s’entendent très mal. Pulligny admire la liberté et le modernisme de la démocratie américaine. Le vicomte est révolté par le maintien de l’esclavage.

Félix Augustin Leclerc de Pulligny explore pendant cinq mois les territoires des Algonquins, Chippawadis, Hurons, Iowas, Sioux, vivant de la propre vie des sauvages. Il est avant tout un chasseur. Dans le Michigan, il se fait adopter par une tribu de chasseurs indiens. Il arrive à l'embouchure du Mississippi sur les bords du golfe du Mexique.

Ce Leclerc voyage aussi au Canada et au Mexique et se blesse grièvement dans une reconnaissance des forêts de l'île de Cuba.

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Le Nouveau-Mexique (1872-1891)[]

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Retour en Amérique (1872).[]

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Un fort au Nouveau-Mexique en 1872.

Frédéric Le Clerc obtient en 1871 la séparation d'avec sa femme. Se retrouvant célibataire, il renoue avec ses attirances pour le continent nord-américain pendant l'hiver 1871/1872. Il vient d'hériter de sa mère, décédée, rue Sainte-Marthe, 106.169 francs, comme cela apparaît au niveau des tables de succession de Tours.

La guerre de Sécession (1861-1865) et la guerre franco-allemande (1870-1871) sont terminées. Il abandonne donc sa femme et un fils qui n'a que six ans, presque sans revenus. Sa fille aînée est mariée avec le colonel Ernest de Rambaud. Ils ont hérité du château et des terres de La Hauteville, ce qui lui évite la misère. Mais c'est une période difficile. Son autre fille, Jeanne, est au château du Haut-Brisay, mariée à un ingénieur.

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Bloomfield ?[]

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Vieille carte du Nouveau-Mexique.

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Horace Porter.

Frédéric Le Clerc ne s’installe pas au Texas, ancien état sudiste. Il se retrouve au Nouveau-Mexique. C’est un territoire fédéral, qui en mai 1872 n’est pas du tout organisé. Il suit certainement, en 1882, un général Horace Porter, futur ambassadeur américain à France (1897 - 1905), membre des Cincinnati, donc d'une vieille famille et francophone. Il crée un poste de traite à environ 8 miles au sud de la rivière San Juan. Ce magasin succède à un bureau de poste à Bloomfield cité de 1881 à 1882.

Le Clerc s'installe à Porter qui prend par la suite le nom de Bloomfield, d'abord dans le comté de Rio Arriba, puis de San Juan, au nord-ouest de l’actuel état de New-Mexico. Le comté de San Juan n'est fondé que le 24 janvier 1887. Il porte le nom de la rivière San Juan. Sa capitale est Aztec.

Dans le nord-ouest du territoire du Nouveau-Mexique - la région où il vit - les Navajos venus du Canada, adoptent l'élevage, l'agriculture et des techniques nouvelles, comme le tissage et la poterie. Mais ils ne se laisseront jamais convertir, ni rassembler systématiquement dans des villages. Ils ne cesseront leurs pillages qu'après avoir été vaincus par l'armée américaine.

Frédéric devient Fred. Il fait là un choix vraiment bizarre en se fixant à Bloomfield. Contrairement au Texas, même des années 1830, la région est vide d’hommes blancs ou presque. En 1832, le marchand Josiah Gregg est le premier à en parler. En 1849, un détachement de l’U.S. Army Cavalry s’intéresse aux ruines indiennes. Mais l’endroit est tellement isolé qu’il est peu visité au cours des 50 ans qui suivent. En 1877, une expédition atteint cette région. Après une brève reconnaissance menée par des érudits du Smithsonian dans les années 1870, Chaco Canyon ne fait l’objet d’une vraie étude archéologique complète qu’en en 1896, cinq ans après la mort du médecin français.

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Les Amérindiens[]

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1873, Navajos près de Old Fort Defiance.

Ce comté est peuplé, même encore de nos jours majoritairement d’Amérindiens, des tribus Navajos, Hopis et Pueblos. Après la guerre de Sécession, l'armée met en place une chaîne de forts afin de protéger les colons et les caravanes. La plupart des tribus sont progressivement parquées dans des réserves près des forts, où ils reçoivent de la nourriture et des fournitures du gouvernement fédéral. Le Clerc est un homme courageux aimant la justice. François Lagarde dans The French in Texas History, Migration, Culture, dit que Frédéric Le Clerc prend la défense des Amérindiens, comme, en 1842, son cousin germain, Félix, celle des esclaves face à un Président des USA esclavagiste.

Selon certains membres de sa famille il veut être chercheur d’or. Mais sur place au Nouveau-Mexique, il exerce la médecine, à Rio Arriba, à Bloomfield, nous dit le selon le Polk's Medical Register and Directory of the United States and Canada, de 1886[18].

Toutefois, avant l'arrivée du train, il est toujours à l'affût de nouvelles expériences scientifiques. Il va être en même temps éleveur, botaniste, pionnier au milieu des indiens Navajos et chercheur d'or. George Bowra écrit dans Area rich in Gold Stories, qui retrace l'aventure des chercheurs d'or dans le comté de San Juan :

Frédéric Le Clerc, un biologiste français et auteur de plusieurs livres scientifiques et médicaux ... fabriqua des boites à rinçage qu'il plaçait dans la rivière où l'eau faisait des remous remplissant ainsi ses boites de sable, l'or se déposant à l'arrière de celles-ci.

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Les débuts très lents de la colonisation (1878)[]

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1880, le train et les colons au Nouveau-Mexique.

Fred Le Clerc finit sa vie à Bloomfield, mais comme la bourgade n'est créée qu'en 1878, nous ne se savons pas où il vit. Il n’existe que quelques fermes le long de la San Juan River. La nouvelle agglomération est le quartier général de la bande des Stockton, tristement célèbre aux États-Unis. Ce gang vole du bétail, torture et tue les fermiers qui le défendent. Ils vendent les bœufs à l’armée. Ils terrorisent toute la région pendant trois ans. Quand Port Stockton, l’un des frères, est tué, la bande cesse d’exister, mais un certain Blancett ouvre un saloon. Tous les pistoleros mexicains et les rois de la gâchette américains s’y retrouvent. Ils terrorisent les pionniers. Plancett est finalement tué lui aussi. Frédéric a obligatoirement côtoyé ce Blancett, car les archives de la First National possède des courriers de lui venant de Bloomfield, dès 1882. Même si les Français sont nombreux, il ne peut s’agir que de lui car il est précisé qu’il est docteur.

C'est l'époque aussi où les éleveurs de bétail du Texas doivent éliminer des criminels, genre Billy the kid. La vraie colonisation ne commence qu'à la fin de cet épisode, vers 1880, sanglant grâce au chemin de fer qui amène des colons. Il est Agent de la Southern Pacific[19].

Bloomfield devient-il un paisible bourg agricole ? Les conditions de vie dans cette contrée lointaine sont très difficiles. Seule l’irrigation après la mort de Frédéric va permettre aux habitants de prospérer. De son temps les paysans sont des éleveurs. Le village de Bloomfield est aussi connu dans l’histoire de la conquête de l’ouest pour ses affrontements entre éleveurs de moutons et de bœufs qui sont aussi violents qu’à Durango.

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Le décès du père de Jeanne (1891)[]

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Pierre tombale des Le Clerc à Bloomfield.

Fred travaille sur les données climatologiques à Bloomfield pendant des années[20] estimé de son entourage, la nationalité américaine lui est attribuée le 2 septembre 1890, suite à sa demande du 2 mars 1872.

The Handbook of Texasnous précise que Frédéric Le Clerc achève sa vie le 3 janvier 1891, à l'âge de 80 ans, à Bloomfield, dans le comté de San Juan au Nouveau-Mexique. Il s'est remarié en 1881 avec une certaine Marie-Jeanne Halbert (1835 - 1909), une Française, de 25 ans sa cadette. Ils ont un fils Frédéric Charles Le Clerc (1881 - 1918), forgeron en 1912 à Bloomfield, qui meurt jeune. Le mirage de la ruée vers l’or ne fait pas que des milliardaires !

La région de Bloomfield, plus connue sous le nom de Chaco Canyon, compte plus de 3.000 sites archéologiques, appartenant à l’importante culture anasazi.

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LE SÉJOUR DE JEANNE CHEZ LES SAUVAGES (1892)[]

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Le voyage dans des régions civilisées[]

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Magasins à New-York en 1895.

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Son lac Michigan est une merveille, faite d'une eau spéciale, unique, à reflets indécis, ni verts, ni bleus.

Après une traversée de l'Atlantique sans problèmes majeurs, Jeanne et son mari, à New-York, sachant qu'ils vont prospecter dans un quasi désert, font des acquisitions de toutes sortes. Ils achètent des conserves de toutes espèces, du thé, du vin, du whisky, des tentes, des matelas, des couvertures... Ils expédient tous leurs achats par grande vitesse, à Durango, pour les y reprendre et les emporter avec eux à Bloomfield.

Ils vont au Canada, ce pays qu'elle juge enchanteur, si vert et si fleuri, que nous avons dû traverser pour atteindre les chutes du Niagara. Elle est cependant déçue par les chutes elles-mêmes.

De Chicago, elle dit que nous connaissons tous cette ville depuis son Exposition universelle de 1893. Jeanne Goussard de Mayolle s'y arrête brièvement avec son mari. Elle est surprise par l'étalement de la ville et la compare avec une créature surnaturelle aux bras immenses[21].

Il semble que ce voyage a lieu dans les années 1880 ou au début des années 90, avant 1893, parce qu'elle dit qu'ils ont visité Chicago avant l'Exposition universelle de 1893[22]. Peut-être 1892, car son père est décédé à Bloombield en 1891. Il a peut-être laissé à son gendre de terrains à prospecter.

Pour elle :

son lac Michigan est une merveille cependant, faite d'une eau spéciale, unique, à reflets indécis, ni verts, ni bleus.

Pendant deux jours et demi, depuis Chicago, ils ne descendent de leur train et traversent les longues plaines de l'Arkansas. Ils y admirent les travaux de défrichage si intéressants des émigrants.

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Étape à Pueblo, Colorado[]

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Plan de la ville de Pueblo, localité qui n'a rien d'une ville arriérée et pauvre.

Jeanne et son mari arrivent en plein Colorado, à Puebla, 1.434 mètres d'altitude. Ils recherchent un hôtel... mais les hôtels de Puebla !. La ville est devenue un centre économique majeur du Colorado, mais les porteurs de fusils et revolvers y font la loi. A côté de quelques beaux édifices publics il est difficile, paraît-il, pour des Tourangeaux de trouver un hôtel digne de ce nom. Un plan de la ville en 1890, et des photos de maisons datant d'avant 1895, permettent d'avoir des doutes sur la description qui suit :

Au rez-de-Chaussée, une salle à manger puante, enfumée, brûlante, noire de milliers d'insectes qui se précipitent sur nous et nous dévorent.
Attachés au-dessus de chaque table, d'immenses feuilles de palmier s'agitent d'elles-mêmes et essaient de nous servir de bienfaisant éventail en même temps que de chasser ces maudits insectes.
Nous montons à nos chambres par un escalier tellement raide qu'il serait beaucoup plus juste de l'appeler échelle. Nous ne trouvons dans ces chambres que l'eau sale et jaune de l'Arkansas, qui ne nous aide guère à sortir du lamentable et poussiéreux état où nous a laissé notre longue route.

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Le voyage jusqu'à Durango[]

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Les voies ferrées au Colorado sont très étroites, comme le matériel ferroviaire.

Alfred-Charles-Marie-Célestin-Edgard Goussard de Mayolle croient que de Pueblo, ils ont encore vingt-trois heures de route avant d'atteindre Durango.

A la gare de Pueblo, ils montent dans du matériel roulant rapetissé et les rails n'ont plus que 80 centimètres d'écartement. Les sièges sont en bois. Le train va avoir vingt heures de retard et dérailler. Il franchit les Rocheuses sans un tunnel, sans un ouvrage d'art, sans un pont solide, sans un garde-fou, côtoyant sans cesse des précipices. Les courbes sont telles, que, constamment, leur train forme demi-cercle, tête et queue se touchent.

A mesure qu'ils approchent du col de la Veta Pass (2.860 m), les courbes deviennent effroyables à monter et dangereuses. Comme la région n'est pas sur, même l'escouade d'hommes d'équipe est armée jusqu'aux dents. Les Indiens ou les Mexicains tuent le personnel et les voyageurs, pour s'approprier leur argent.

L'industrie des chemins de fer en Amérique sont créés avant les villes. Le but est de faire vite et économiquement. Enfin Jeanne peut dire :

Mais nous sommes en vallée et la vallée c'est Durango.

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Durango en 1892[]

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Durango est une ville peu sure à l'époque du Far West.

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La gare de Durango.

Durango, dans le Colorado, est le terminus du chemin de fer à cette époque. Jeanne Le Clerc écrit :

Il y a quelques années, Durango n'existait pas, c'était tout simplement un fond de vallée resserrée entre les montagnes, que traversaient uniquement les prospectors en quête d'une mine ou d'un filon. Aujourd'hui, c'est une ville toute en bois, toute en voliges, les maisons y sont mêmes faites en caisses d'emballage, mais rien d'essentiel n'y manque. Vous y trouverez des églises de tous cultes, écoles de filles et de garçons, banque, imprimerie, télégraphe, magasins, théâtres, salles de bal, champ de courses, que sais-je ? même des coups de revolver en abondance. Dès notre arrivée, on avertit mon mari qu'il ne doit jamais passer sans armes dans un certain quartier de la ville, après le soleil couché, à moins, cependant, de m'avoir à son bras, car, Mesdames, en Amérique, nous sommes la toute-puissance, nous sommes la force, nous sommes l'emblème du pardon et de la paix, nous sommes littéralement tout !

Comme la Californie, le Colorado est enfiévré d'or, de mines. On n'entend pas parler d'un autre sujet, on ne voit absolument rien autre chose que des prospecteurs venant s'offrir ou s'équiper. Du fait des hors-la-loi ils comprennent pourquoi cette vaste et sauvage contrée est à peu près ignorée de tous les Européens et presque aussi inconnue des Américains normaux qui, à cette époque, malgré leur hardiesse native, n'osent guère s'y aventurer.

A la gare de Durango, les employés ne restituent pas les colis envoyés de New-York. Ils ne leur donnent ni renseignement, ni indice.

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Départ pour Bloomfield[]

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Un buggey et deux mules dans le désert du Colorado.

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Animas River, près de Durango.

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L'Animas River, qu'ils traversent sept fois.

Comme les Goussard doivent aller à Bloomfield, ils ne s'éternisent pas à Durango. Ils ont 35 lieues à faire à cheval à travers les Rocheuses, deux jours et demi de route, avant d'arriver à Bloomfield, dans le Nouveau-Mexique.

Le Nouveau-Mexique est la partie nord de l'ancien Mexique qui devient la possession des États-Unis, en 1848, par le traité de Gadalupe-Hidalgo.

Ils achètent une tente, des chevaux, des selles, et pour mettre leurs bagages et leurs domestiques, une voiture élégante du pays, un buggey, qu'ils attellent à deux mules. Le buggey est une sorte de chariot très secouant, monté sur quatre roues.

Les Goussard laissent à Durango leurs alliances, l'Indien pouvant aimer ce qui brille, et ils cousent leur billets de banque à l'intérieur de leurs flanelles.

Son mari est chargé de prospection minière, aux confins du Colorado et du Nouveau-Mexique, mais il n'est pas qu'ingénieur. Il possède des actions de mines[23].

Jeanne endosse un costume masculin, le seul qui puisse résister à la vie qui l'attend. Elle est vêtue de velours de chasse gris côtelé, gilet, veston, pantalon, grandes bottes qui montent jusque par dessus mes genoux, revolver à droite de ma ceinture, cartouches à gauche.

Ainsi équipés, les voilà tous partis, les prospecteurs à cheval, leurs domestiques, et les bagages dans le boggey. Ils arrivent devant le Florita, la première des rivières à traverser. Ils vont suivre la vallée de l'Animas River jusqu'à Aztec, et la traverser sept fois. La rivière qui baigne Bloomfield c'est le San-Juan dans lequel se jette l'Animas.

Le Florita a la largeur d'une rivière mais le courant d'un torrent. Il le passe à cheval. Hélas,tous les cinq ans, il tombe dans ce pays, des pluies diluviennes, et les malheureux cavaliers, ainsi que leurs montures, ne reconnaissant plus du tout leur chemin au moment où ils veulent traverser, sont le plus souvent engloutis dans ces immenses torrents.

Ils campent au bord du Florita, dont l'eau leur sert de boisson pour gens et bêtes. Le lendemain, malgré des coups de carabines, ils échappent de peu à la mort écrasés par un troupeau de bisons. Comme leurs conserves sont de mauvaise qualité et le gibier très rare, on peut s'étonner qu'ils ne tuent pas un bison pour manger de la viande de qualité

Les voyageurs essuient un terrible orage de grêle. La sente disparaît et les chevaux, aveuglés, refusent d'avancer.

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La réserve des Navajos[]

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Ils pénètrent dans la Réserve des Navajos.

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Parure des Navajos.

Ils traversent l'Animas, plus large que le Florita, et tout aussi torrentueux.

Puis, ils se retrouvent en plein désert situé dans la Réserve des Navajos. Devant nous, une plaine immense, infinie, du sable, toujours du sable, pas une seule pierre. Jeanne écrit Le gouvernement américain a été dur et brutal pour mes pauvres Indiens. A coups de promesses qui n'ont jamais été tenues, il leur a pris tout leur territoire, les refoulant sans cesse et finissant par les parquer, comme de véritables bêtes fauves, dans d'immenses terrains infertiles et incultivables qu'on appelle les réservations indiennes. Comme Jeanne Goussard de Mayolle, une autre exploratrice, Mme Grandin, est indignée du sort fait aux Indiens[24].

Cette tribu des Navajos les intéresse tout particulièrement, car ils vont être leurs voisins immédiats. Les Navajos, dit leur légende, sont nés d'un épi de maïs. Ils vivent exclusivement de l'élevage de leurs troupeaux, leur unique richesse. Selon Jeanne, ils ont 40.000 chevaux, 700.000 moutons, 300.000 chèvres. Ils tissent la laine de leurs moutons en superbes couvertures dont la durée et l'imperméabilité défient toute concurrence :

Sur ces couvertures, j'ai trouvé des dessins qui nous sont connus, de grandes croix, de grandes fleurs de lys, mais je n'ai jamais pu savoir qui leur avait donné ces notions de nos dessins.

Les Navajos vivent en général sous la tente de forme conique, soutenue par de grandes perches placées en rond et attachées en haut par des peaux de bêtes, presque toujours des peaux de castor.

Quelques Navajos, mais c'est l'exception, se construisent des huttes en terre, en bois, en feuillages sous lesquelles ils s'étendent ou contre lesquelles ils s'appuient pour surveiller leurs animaux.

Les Navajos vivent à l'âge de pierre. Ils taillent le silex en outils, en marteaux, en ciseaux. Ils se servent des dents et des cornes des animaux pour se faire des instruments divers.

Ils aiment les perles de verroterie et surtout les chapeaux haute forme. Ils décorent leurs productions des dents d'animaux. Les tribus qui avoisinent le Rio Grande sont relativement civilisés.

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D'Aztec à Bloomfield[]

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Rochers colorés.

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Vue aérienne de rivières asséchés au Mexique.

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Armoise (sagebrush).

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Des milliers de tentes... .

Après la troisième traversée de l'Animas, nous nous trouvons en face d'une montagne des plus curieuses. Elle est toute faite de couches superposées de roches de nuances très distinctes, pourpre, vert, vert jaunâtre, ocre, blanc, l'effet en est aussi original qu'inattendu. L'Américain, qui nous guide, nous affirme que la montagne prend la teinte indicatrice du minerai qu'elle renferme.

Après la cinquième traversée de l'Animas, ils côtoient ce qu'elle appelle des arroyos, de curieuses rivières fossiles, dont le sable brille à tel point que les Indiens croient que ces eaux taries cachent encore des trésors.

La pauvre Jeanne dans ce paysage semi-désertique souffre :

Le soleil est tel, tellement dévorant qu'à travers un voile de gaze très épaisse, mis en double sur mon visage, ma peau pèle, se lève par écailles, absolument comme si je l'avais enduite de teinture d'iode.

L'atmosphère est si sèche et translucide que l'œil en perd réellement la notion des distances. Ils sont dans des contre-forts désertiques des Rocheuses.

Les formes de la montagne deviennent vraiment impossibles à décrire. Ici on dirait de vieux donjons, d'anciennes ruines de châteaux-forts; ailleurs, c'est un chaos fait de roches immenses qui s’emmêlent et s'entrecroisent; ailleurs encore, ce sont des blocs isolés, ciselés, taillés, tailladés, qu'on croirait véritablement avoir passé par la main de l'homme.

Plus ils avancent, plus la végétation tend à disparaître. Le nombre et la vigueur des armoises va toujours en diminuant. Cependant, je remarque sur le sol une petite plante rabougrie, très vivace, dont je n'ai vu nulle part l'équivalent. Les Américains l'appellent gamma-grass, parce que sa fleur a la forme du gamma grec. Les animaux en sont très friands à cause de sa saveur salée.

Le sol est entièrement pénétré d'un mélange de sel, de carbonate et d'azotate de soude, qui, sous l'influence de sa capillarité et de son humidité, monte avec la sève par la tige du gammagrass.

Un peu plus loin, elle aperçoit un camp, des milliers de tentes, mais l'Américain qui est avec nous, nous dit que ce ne sont pas ni un camp ni des tentes, mais de petits mamelons blancs, à forme conique, forme qu'affecte la montagne au bord du rio San Juan.

Le rio San-Juan, c'est Bloomfield, enfin ! ! !

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BLOOMFIELD (1892)[]

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Les maisons de Bloomfield en 1892[]

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Maison des Salmon.

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Maisons datant parait-il de 1890 dans la bourgade voisine d'Aztec.

Quel image faut-il se faire de Bloomfield, en 1892, celles donnent de rares sources américaines ou ce qu'en raconte Jeanne :

Bloomfield se compose de deux huttes ou pour parler le langage du pays de deux log-houses, construit de la sorte : des arbres entiers, placés debout, reliés entre eux par du sable mouillé en guise de ciment. Une seule ouverture, pas de porte; chaque soir l'ouverture est masquée par une planche quelconque.
Sur le sol, ni carreaux, ni pavés, ni plancher, toujours ce sable; cet éternel sable qui va devenir un de mes plus grands supplices. Il pénètre partout, dans les chaussures, dans les vêtements, dans les cheveux, dans la gorge, dans les yeux, et me cause une souffrance incessante.

Comme son père, médecin, a vécu et est mort à Bloomfield, on a du mal à imaginer que sa veuve et son fils survivent dans des cabanes aussi misérables. La maison des Salmon, qui date de cette époque, démontre néanmoins que les constructions sont très primitives et témoignent du peu de moyens des colons.

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Le capitaine William Bullock Haines[]

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William Bullock Haines (1839 -1908)

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Manoir de Nutbourne.

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Vieille maison de Bloomfield.

La suite du récit peut surprendre :

Bloomfield a été créé par deux bandits, l'un, un Irlandais nommé Hains, faussaire, bigame, je ne sais plus bien encore; l'autre, un ancien instituteur, nommé Huse, dont le passé ne vaut pas mieux. Tous deux sont venus dans ce grand désert se mettre à l'abri de la justice. Ils sont jeunes, actifs, vigoureux, intelligents; ils ont fondé un bureau de poste, là où il n'y avait rien; ils ont créé un magasin d'épicerie où, à force de whisky, de perles de verroterie, de chapeaux à haute forme, les trois grands moyens de séduction, ils attirent les Indiens. Ils leur achètent, pour presque rien, leurs merveilleuses couvertures dont ils ne soupçonnent pas la valeur, et que Hains et Huse vont, au loin, revendre fort cher.

Or nous savons qui est ce Haines :

William Bullock Haines (1839 - 1908) est né au manoir de Nutbourne, à côté de Pulborough, Sussex, Angleterre. William Bullock épouse vers 1862 Mary Jane Belling et a 9 enfants. William Bullock a 16 frères et sœurs, mais les Haines du manoir de Nutbourne sont des écuyers anglais[25] et donc en rien irlandais.

Haines (1839 - 1908) émigre aux Etats-Unis. En 1878 il crée un magasin général à Bloomfield et il signe un contrat avec le gouvernement territorial pour fournir une unité de la milice locale, selon Swadesh. Il est cité de 1881 à 1882. William Bullock Haines est rejoint, en 1882, par le général Horace Porter (1837 - 1921), futur ambassadeur américain à France (1897 - 1905), membre des Cincinnati. Ils créent ensemble un poste de traite à environ huit miles au sud de la rivière San Juan. Le docteur Frédéric Le Clerc, marié depuis 1881 à Marie Jeanne Halbert, les accompagne. Frédéric Le Clerc et son épouse ont un enfant : Fred.

En 1876, William B. Haines est le premier résident de Bloomfield. La bande à Stockton opère à partir de Bloomfield. Le gouverneur Lew Wallace nommé Haines capitaine de la Garde San Juan, un groupe de 73 hommes chargé d'empêche de nuire des bandits tels que l'infâme Ike Stockton. L'adjudant général Max nomme Haines juge de paix[26]. Les frères Stockton sont liquidés en 1881.

John Blancett crée peu de temps après un saloon à Bloomfield, où se saoulent tous les hors la loi de la région. Cela ne dure pas longtemps. À la fin octobre 1882, ce John Blancett est tué par Guadalupe Archuleta, près de Bloomfield.

Vers 1883-1885, il crée un autre poste de traite à Gallegos Canyon, où il vend entre autres du whisky. Il y a 3-4 magasins de ce type autour d'Aztec et Bloomfield.

La bourgade devient prospère grâce à l'irrigation.

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Jeanne Goussard et les modes de vie dans le sud-ouest des USA[]

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Couverture navajo avec croix.

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De nos jours certains sont nostalgiques même des lits du Far West.

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Il existe bien un Pan De Campo (Cowboy Pain). Il est plus épais qu'une tortilla, mais plus mince qu'un biscuit et a un aspect effectivement peu appétissant.

Jeanne Goussard continue son récit :

Les quelques dollars que Haines et Huse donnent aux Indiens en échange de leurs couvertures, comme ceux-ci ne connaissent pas non plus la valeur de l'argent, ils les convertissent en bracelets, qu'ils font à coups de marteau, faute des outils qu'ils ignorent. Bien entendu, j'ai au bras, un de ces bracelets comme spécimen.

Jeanne se croit dans une région accueillant des touristes. A cette époque dans la plupart des régions d'Europe il n'y a pas d'hôtels en dehors des grandes villes, des zones de thermalisme et des lieux touristiques. Cette description semble en outre exagérée :

Nous demandons à Hains où est l'auberge, car nous avons bien grande hâte de nous reposer, mais cette question le fait beaucoup rire. Il nous dit qu'il n'existe aucune auberge dans le pays et que ce ne sont pas les voisins qui nous gêneront, puisqu'il n'y a que huit huttes sur seize lieues carrées de terrain. Néanmoins il a pitié de notre détresse et consent à nous emmener chez son voisin le moins éloigné qui veut bien momentanément nous céder sa hutte. Mais, c'est une abominable écurie qui tombe en ruines, le vent et la pluie y entrent en maîtres, et, quand nous y arrivons, nous y trouvons six pouces d'eau.

La narratrice continue à énumérer les problèmes qu'elles rencontrent :

Les lits n'existent pas dans ce pays. Ce qui en tient lieu est absolument disposé comme les perchoirs de nos poulaillers. Une dizaine de perches, placées en long, soutenues par des piquets. Le soir, vous jetez là-dessus un vieux vêtement hors service ou une couverture quelconque et voilà sur quoi il faut dormir. Nous n'avons pas même de pain à notre disposition, car les rares habitants de ce désert donnent le nom de pain à l'horrible mélange suivant : vous mettez dans une casserole plate de la farine et du saindoux, vous mêlez bien, vous placez du feu dessus et dessous, vous laissez cuire un quart d'heure et il sort de là une atroce galette, mi-cuite, lourde et grasse, que les estomacs civilisés se refusent absolument à digérer ! Cependant, c'est ça ou rien, de même que c'est le perchoir pour dormir. ou rien du tout. Malgré nos répugnances, nous nous décidons à dîner avec la détestable galette et à nous hisser à nos perchoirs.

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Boire et manger[]

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Les eaux de la rivière San Juan coule à Bloomfield.

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Comme le gibier est rare, ils mangent des rats, des scorpions, des serpents...

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Magasin à Farmington, à côté de Bloomfield, en 1885. Ils existent plusieurs commerces.

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Jeanne Goussard de Mayolle, née Le Clerc, chez les sauvages.

Les malheurs de Jeanne continuent :

Le lendemain, le dos brisé par les inoubliables perches, j'envoie un de mes hommes au San-Juan pour me chercher de l'eau, le San Juan n'est qu'à cent mètres de nous. Il me rapporte un seau d'un liquide vaseux, puant, qui n'a jamais été de l'eau. J'essaie bien de la filtrer, mais il me faut un temps considérable pour arriver à un très mauvais résultat et nous n'avons pas autre chose que cette fange à boire, et à manger absolument rien.
Je supplie le secrétaire de mon mari de partir en chasse. Il n'est pas possible que ces superbes montagnes ne renferment pas un gibier quelconque. Il part, il revient après des heures de recherches me rapportant un unique lapin, qui devait bien être tout seul de son espèce, car nous n'en n'avons jamais vu un second, et je vous jure qu'il nous parut joliment petit, après cuisson, pour apaiser nos faims canines, aiguisées encore sans doute par ce grand air. Nous pensons très sérieusement à nous nourrir de scorpions, car les scorpions et les tarentules nous poursuivent jusque sous notre log-house. Nous savons que les Indiens mangent les scorpions, qu'ils les font griller, qu'ils les avalent avec délices, mais nous sommes poltrons, maladroits, inexpérimentés, l'horrible bête nous dégoûte, et enfin nous ne pouvons pas parvenir à la prendre.

Grâce à Jeanne nous découvrons que le nord du Nouveau-Mexique a des amplitudes thermiques de 63° entre le jour et la nuit. La région de Farmington, qui est à la même altitude, 1.600 m., a un climat semi-aride. En été il fait rarement 45° et surtout il ne gèle jamais la nuit :

Nous nous nourrissons exclusivement de tomates, le seul légume qui puisse résister à nos latitudes. Nous avons 18 degrés en dessous de zéro, la nuit, et 45 degrés en dessus de zéro, le jour. On essaie bien de semer du blé et de l'avoine, mais on est toujours forcé de les faucher en vert; ils ne peuvent jamais atteindre maturité. De même pour les pommes de terre, elles ne mûrissent jamais.

Cette région produit désormais grâce à l'irrigation beaucoup de légumes.

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Les huit bandits de Bloomfield[]

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Ruines de la ferme de George Salmon, elle même bâtie sur des ruines indiennes, à Bloomfield.

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Ange Pic, 15 miles au sud de Bloomfield, est une formation géologique, qui a 40 millions d'années ans, et ressemble à un ange agenouillé avec une aile cassée.

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Très savoureuse, la viande de bœuf séchée permet aussi de faire le plein d'énergie.

Peter et George Salmon, ainsi que leur famille bénéficient comme les autres pionniers d'un Homestead Act (littéralement "Loi de propriété fermière"). Grâce à Lincoln cela se passe comme cela sur la Trontier. Jeanne n'est plus en Touraine et les pionniers sont des gens très pauvres. Alors que son père cinquante ans plus tôt dit le plus grand bien des Nord-Américains s'installant au Texas, Jeanne voit dans les fermiers de Bloomfield des bandits.

Chacun des huit bandits, qui peuplent ce désert, a amené avec lui vaches et taureau. Bien souvent, dans la montagne, j'ai assisté à des courses de taureau beaucoup plus émotionnantes que celles d'Europe; car enfin, les animaux, absolument libres, peuvent, dans leur fureur, vous éventrer très proprement en passant près de vous, vous ou votre cheval. D'ailleurs, tout est danger pour nous ici, les hommes comme les animaux, et nous ne devons jamais quitter nos armes un seul instant.

Même quand ils marquent leur bétail les fermiers de Bloomfield sont appelés des bandits :

Chaque année, les huit bandits en question font une battue générale de toutes les bêtes. Le jeune nouveau-né, le jeune veau qui suit la mère est marqué aux initiales que portent celles-ci, initiales bien entendu, qui sont celles du propriétaire, mais cette battue est extrêmement périlleuse et dangereuse. Le jeune animal, né en plein air, élevé en plein air, qui ne connaît absolument que l'indépendance, se fait suivre le plus longtemps qu'il le peut, sur les rochers les plus escarpés, avant que d'être prisonnier du lasso.

De nos jours la viande séchée des Grisons se vend très cher, mais la Tourangelle appelle cela de la viande momifiée :

Il est très rare ici de manger de la viande fraîche. C'est tout à fait exception que tuer vache ou taureau. Cependant quand cela arrive on se partage la bête, on la dépèce en petites lanières minces, longues et étroites, qui sont exposées à ce grand soleil et qui y deviennent tannées, momifiées de telle sorte que, quelques soient les heures de cuisson auxquelles on la soumette, cette viande reste absolument inattaquable. Pour ma part, j'ai fait preuve de beaucoup de bonne volonté, je n'ai jamais pu en venir à bout.

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La faim[]

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Capturer une vache, la marquer et surtout la traire ça n'est pas évident.

Le pays à l'époque est désertique, donc se ravitailler est difficile, mais Aztec et Farmington ne sont pas si éloignés :

Les pluies diluviennes qui, comme je l'ai dit, tombent cette année, nous donnent de sérieuses inquiétudes d'être emportés quelque jour dans un formidable courant. Notre San-Juan déborde de toutes parts, il charrie tout un monde et, le plus grave, c'est qu'il a emmené la bande de terre sur laquelle étaient nos pauvres tomates, notre unique ressource. J'ai fait dix lieues à cheval à la recherche d'un légume pouvant succéder aux tomates; je n'ai trouvé qu'une brassée de choux qu'on m'a vendue 35 francs. Ah ! Mesdames, ce n'est ni une économie, ni une sinécure d'être maîtresse de maison dans les Rocheuses, n'y allez jamais voir ! De la montagne, heureusement, on a pu m'amener une vache sauvage, mais elle n'a pas encore été traite, mes domestiques en ont peur et personne ne saura jamais combien j'ai risqué de coups de corne, combien il m'a fallu d'heures, de patience et de diplomatie avant d'arriver à faire comprendre son métier à la pauvre bête; mais enfin ce lait devait être extrait à tout prix, il était notre unique boisson et à peu près notre unique nourriture.

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Leur log-house[]

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Un autre log-house à Bloomfield.

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D'ordinaire ce sont les chiens qui attaquent les coyotes.

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Les maisons de certains Indiens sont plus confortables que celles de certains farmers.

Jeanne continue à parler de ses conditions de vie difficiles :

Nous nous sommes faits construire un log-house pour être chez nous; matériaux habituels, toujours ce sable, cet éternel sable; seulement nous avons supprimé les perchoirs qui étaient vraiment par trop désagréable. Nous couchons tout simplement sur le sol, sur nos matelas de copeaux de bois, ce qui est encore moins dur, mais beaucoup plus dangereux, au point de vue des visites possibles des scorpions, des tarentules et même des serpents. Nous couchons chaque nuit avec une carabine chargée à dix-sept coups, placée au-dessus de chacune de nos têtes, le revolver à portée de la main. Toutes les nuits, l'un de nous veille à tour de rôle, pour nous avertir en cas de danger. Ces pluies inusitées affolent les animaux. Des bandes de chiens, qui viennent de je ne sais d'où, entrent nuitamment et précipitamment dans notre log-house, poursuivis qu'ils sont par les coyotes qui veulent les manger, et je ne sais rien de plus odieux que ce brusque réveil causé par des haleines chaudes qui vous frôlent; c'est épouvantable ! Le service des postes est fait par Hains, c'est vous dire combien il est irrégulier. Nos lettres recommandées ne nous arrivent presque jamais. Elles sont débarrassées en route de leur contenu, ou arrêtées en route dans un but qui n'est pas douteux. Quant à nos journaux, ils nous arrivent après 35 jours de retard, s'ils nous arrivent.

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Les serpents[]

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Les matelas de copeaux de bois à même le sol, c'est la dernière mode chez les bobos.

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Serpent roi de Californie.

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Serpent à sonnette.

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Mandala navajo sur le mouvement des directions, ici renforcé par la symbolique du serpent.

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Collier protégeant des morsures de serpents.

Le Nouveau-Mexique est le paradis des serpents, notamment les serpents à sonnette. Ils viennent même dans les maisons pour chasser les rats :

Un matin, un inoubliable matin, j'étais assise par une chaleur absolument cruelle, sur mon matelas de copeaux de bois, nous n'avions pas un seul siège. Je lisais une vieille feuille française qui, malgré son grand âge, m'intéressait toujours, et, dans l'espoir d'avoir moins chaud, j'étais restée dans un très simple appareil. Voulez-vous bien m'excuser de vous dire lequel ? J'étais tout simplement en chemise de nuit, quand je sentis sur ma jambe droite une indéfinissable sensation de froid. Je n'y fis pas d'abord autrement attention, supposant que ce devait être un courant d'air quelconque, mais comme cette sensation de froid persistait, se localisant toujours à la même place, à la fin, j'abaisse mon journal et je regarde. Un immense serpent blanc et noir, gros comme mon poignet, long de 2m 50, était enroulé autour de ma jambe, et de sa tête sortait un dard noir, pointu, agité, dégoûtant, horrible ! J'ai poussé un cri d'horreur tel que le malheureux reptile a eu, je crois, presque aussi peur que moi. Il est descendu précipitamment de ma jambe. Alors, je me sens libre, je bondis, j'appelle mes hommes et mon mari accourent, mais mon mari se moque de moi, il nie l'aventure, il prétend que je deviens hallucinée, et, en effet, le monstre a disparu. Mais je ne me tiens pas pour battue, mes hommes et moi nous le cherchons et nous finissons par le retrouver ramassé sur lui-même dans un des interstices de la hutte. Dans ma rage, je veux le tuer moi-même et bêtement, je lui tranche la tête, ce qu'il avait de mieux; néanmoins, je l'enfile triomphalement sur une longue perche, où il est encore. Je regrette beaucoup, Mesdames, Messieurs, qu'il ne soit pas ici. Maintenant qu'il n'est plus dangereux, j'aurais eu un véritable plaisir à vous le présenter.

Cet immense serpent blanc et noir est certainement un serpent roi de Californie : une couleuvre dont la morsure est très douloureuse. Mais avec les serpents à sonnettes c'est la mort à chaque morsure :

Les serpents sont une des calamités de ce pays. Les serpents à sonnettes y pullulent, et s'il faut en croire les petits anneaux chantants qu'ils portent sous la queue, ils y vivraient fort longtemps. Chaque année, il leur pousserait un nouveau petit anneau, et c'est par le nombre de ces anneaux qu'on pourrait savoir leur âge. Sauf le porc qui sort indemne des piqûres du serpent à sonnettes, tous les animaux en ont horriblement peur. Le cheval, quand il entend ce petit bruit de clochettes, que malheureusement je connais beaucoup trop bien maintenant, tremble, recule où reste sur place, mais vous ne le ferez jamais avancer, quelques coups d'éperons que vous lui donniez. C'est tout à fait inutile d'insister, il ne passera pas.

Un Européen en général a peur des serpents. Chez nous NOUS avons des vipères, mais à part quelques Méditerranéens qui les mangent, nous nous contentons de les éliminer de nos jardins et encore plus de nos maisons. Mais chez les Indiens il n'en n'est pas de même :

Les Indiens endorment les serpents avec une sorte de bouillie de tabac et, quand le reptile est endormi, ils lui arrachent le crochet du venin, à l'aide de pinces. Mais cette opération nous a paru tellement dangereuse que, pour notre propre compte, nous n'avons pas osé la tenter.

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Les mines ?[]

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Partout dans la montagne, des déblais provenant des anciennes mines et des bâtiments délabrés émaillent le décor.

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Montagnes autour de Bloomfield.

Venus pour exploiter des mines Goussard de Mayolle ne s'en soucie guère :

Les pluies ayant cessé, nous pouvons enfin creuser la question mines. Nos explorations des environs nous ont laissés plus étonnés que convaincus. Quelle singulière formation géologique, quelles stratifications, quelles colorations diverses dans les coupures de ces argiles, ferrugineuses pour la plupart. Bien entendu, nous avons pris bon nombre d'échantillons dans les matières pourpres, vertes et blanches, de composition relativement inconnue, pour essayer d'en déterminer la nature à l'aide du chalumeau. D'or métallique, pas trace; de possibilité de filons de quartz aurifères, pas davantage, et nous procédons à l'examen. Les matières vertes et blanches accusent du fer, du cuivre et des métaux inconnus. Aucune trace d'or ni d'argent, puisque les globules métalliques ne sont pas attaquées par le mercure. Il n'en est pas de même de la matière pourpre. Soumise au chalumeau, il se produit un dégagement assez abondant de soufre, d'arsenic et de phosphore, tous trois si faciles à reconnaître par l'odorat. Nous sommes donc en présence, c'est évident, des sulfures, des arséniures, des composés phosphorés, mais quel métal ou quels métaux entrent dans ces combinaisons ? nous n'en savons encore absolument rien.

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LES INDIENS[]

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Épiés par les Indiens[]

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Épiés par les Indiens.

Épies par les Indiens ils décident d'aller à leur camp :

Depuis quelques jours, nous ne pouvons plus nous faire illusion ; nous sommes épiés, suivis, surveillés par les Indiens qui connaissent seuls, dit-on, les véritables cachettes des métaux précieux et s'en montrent fort jaloux. Si cette surveillance persistait, si les Indiens avaient la certitude que nous sommes ici pour les mines, pour leurs mines, cela aboutirait fatalement à la mort de l'un de nous, peut être à la mort de nous tous.

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Le camp indien[]

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Frederic Remington : Navajos vers 1890.

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Navajos en 1890.

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Hogan navajo en 1890.

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Navajos peignant le sable en 1890.

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Navajos à Shiprock, Nouveau-Mexique, vers 1900. Photo par HS Poley. Courtesy of Western Département d'Histoire / Généalogie, Denver Public Library.

Jeanne et ses proches se rendent au camp des Navajos :

Alors, nous nous décidons à pousser une nuit jusqu'à leur camp, chargés de perles de verroterie, de whisky, de tout ce que nous pourrons rassembler de chapeaux à haute forme; il faut à tout prix les séduire. Cette tentative hardie ne me sourit pas beaucoup. Je trouve que nous sommes bien peu de carabines pour nous mesurer avec tant de flèches ; cependant, à la réflexion, j'essaie de me rassurer en me disant qu'après tout nous ne ferons que leur rendre la visite de politesse, qu'ils nous ont faite eux-mêmes les premiers. Dernièrement, en m'éveillant, j'ai trouvé autour de notre hutte, des visages tellement hideux que ce ne pouvaient être que des Navajos. Ils étaient tout nus, sans couvertures, sans vêtements d'aucune sorte, n'ayant rien que la flèche sur l'épaule, grimpés, sans selle, sur des chevaux maigres. Ils m'ont paru de taille moyenne. Les cheveux sont longs, noirs, épais, enroulés dans des peaux de bêtes, en général des peaux de castor. L'œil est noir, dur, profond; la lèvre est épaisse et bestiale, le menton est imberbe, puisqu'ils s'épilent, et la peau est tellement desséchée, parcheminée et tannée, qu'à travers les immenses colliers de dents d'animaux et de perles de verroterie qu'ils portent, tout d'abord, cette chair humaine m'a fait véritablement l'effet d'être une étoffe. Les chefs se maquillent d'outrageante façon. Il se mettent du rouge au front, du jaune sur les joues, du vert au menton et tout cela étalé grossièrement, salement, de façon qui rend l'ensemble répulsif. 'Nous leur avons offert des cigares qu'ils ont fumé, Messieurs, avec tout autant de plaisir que vous pourriez le faire, mais nous n'avons jamais pu causer avec eux, car ils ne comprenaient ni le français, ni l'anglais, ni l'espagnol. L'un d'eux cependant m'a dit et répété à satiété : "Bonjour, Madame !" Malheureusement je n'ai pas pu aller plus avant dans la conversation ni savoir qui lui avait appris ces deux mots, ni même s'il en connaissait le sens. Peut-être les tenait-il d'un missionnaire, puisqu'on affirme que les missionnaires pénétrèrent dans cette tribu dès 1680, ce qui m'étonne énormément, car la tribu des Navajos est une tribu essentiellement sauvage, qui ne professe en rien le culte catholique et qui est essentiellement imbue de superstitions qui réagissent sur sa vie et sur ses mœurs, d'ailleurs très patriarcales. Je reviens à notre visite de nuit chez les Navajos. Des tentes, qui composent ce camp, s'échappent, à notre arrivée, des flots de créatures humaines qui se précipitent de notre côté, la flèche tendue et forment autour de nous un immense cercle qui devient une véritable prison.

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Le chef de tribu[]

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Manuelito (Navajo).

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Indiens qui dansent pour guérir les malades et les blessés.

Ils ont un bon contact avec le chef :

D'une main, nous agitons nos tous puissants revolvers, de l'autre, nous montrons nos moins puissants présents, alors le chef s'avance jusqu'à moi, me salue très humblement, détache de ses oreilles de grands anneaux d'argent qu'il passe à mon bras, ils y sont toujours, détache de son front un croissant d'argent, qui est un ornement et qu'il attache, très adroitement ma foi, dans mes cheveux ; puis il me demande, et combien je suis heureuse de pouvoir le comprendre, il parle un mauvais anglais, mais enfin intelligible, si je veux bien autoriser la distribution de nos présents. Bien entendu, j'autorise. Alors, ce sont des gestes, des cris de joie, des gambades, un vacarme qui veut sans doute dire merci mais que je renonce à décrire, et quand tout ce beau tapage est fini, le chef nous demande si nous voulons bien le suivre sous sa tente. Nous acceptons d'autant plus volontiers qu'il s'agit maintenant de le rassurer quant aux mines. Il nous interroge très longuement sur nos projets que nous lui dissimulons de notre mieux, et dès qu'il est tout à fait convaincu, il cause avec nous facilement. Il nous raconte, par exemple, que le titre de chef dans la tribu des Navajos n'est jamais héréditaire. Le chef est choisi parmi les hommes les plus influents ou ceux qui ont les plus grands troupeaux. Le chef est parfois docteur, mais la médecine s'exerce de façon spéciale dans cette tribu. Le médecin se borne à danser autour du patient, en chantant, ou à l'entourer de conjurations, de sortilèges, d'évocations de toutes sortes, et il paraît que cette médecine là réussit tout aussi bien que la nôtre.

La tribu est tellement ignorante qu'elle ne sait pas ce que c'est que le beurre et le fromage. Elle n'a jamais fait ni vu l'un ou l'autre de ces deux produits.

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La jeune fille chez les Navajos[]

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Indienne et Ange Pic.

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Indiennes et laine.

Jeanne nous parle des femmes indiennes. En été toutes les femmes s'habillent en blanc, costume qui ne fait paraître que plus affreuses les têtes jaunes et les pattes noires. Comme Jeanne Goussard de Mayolle, une autre exploratrice, Mme Grandin, est toutefois indignée du sort fait aux Indiennes[27]. Elle ajoute :

La jeune fille Navajo appartient à sa famille jusqu'à son mariage. A ce moment, une sorte de contrat intervient entre le père de la jeune fille et le fiancé qui paie sa future femme cinq ou six chevaux. Payer sa femme dix ou douze chevaux est un prix exorbitant. Cependant, à titre de légende, on conserve, dans la tribu, le souvenir d'une belle fille, belle pour une Indienne, entendons-nous, qui aurait été payée par son futur mari jusqu'à quinze chevaux. Mais je dois ajouter qu'en plus de son joli visage et de sa taille fine, elle avait un charme tout à fait inconnu des autres femmes de la tribu; elle avait le visage propre, tandis que d'ordinaire Mesdames et Mesdemoiselles Navajos professent pour l'usage de l'eau la même horreur que le chat. Elles sont de tempérament très indépendant et quittent leurs maris pour le plus petit sujet de discorde. Ils le savent et d'ordinaire traitent leurs femmes avec beaucoup plus d'égards que ne le font les hommes des autres tribus. Elles sont mères exceptionnellement tendres. Très malheureuses, très humiliées de la stérilité qui les atteint depuis plusieurs années, elles ne savent comment faire, quand enfin un baby doit leur venir, pour rendre suffisamment chaude la petite couchette qui attend. Elles remplissent d'abord le petit berceau de bonnes fourrures et comme si les fourrures n'étaient pas encore assez moelleuses, elles ajoutent une grande quantité de duvet, tiré de l'épi du roseau, qui sert d'ouate.

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Les origines des Navajos[]

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L'homme de Kennewick.

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Migrations humaines et ADN mitochondrial (datations en milliers d'années avant le présent). Les théories du vieil Indien ne sont peut-être pas si erronées que cela.

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Les origines des Amérindiens ?

Les populations amérindiennes essaient de freiner l'évolution actuelle de la recherche sur les découvertes de plus en plus nombreuses de squelettes paléo-américains de types europoïde ou australoïde, en exigeant, comme la loi NAGPRA le permet, le réenterrement rapide de tous ces ossements qui révolutionnent depuis une vingtaine d'années l'histoire des premiers peuplements de l'Amérique. Le cas de l'homme de Kennewick, dont l'étude révèle une origine caucasienne ou europoïde et non mongoloïde, en est le meilleur exemple.

Jeanne interroge le vieil Indien :

Et pendant que mon chef cause, je remarque sous sa tente, des pierres sculptées qui m'intriguent beaucoup. Elles représentent une oie, un chat, un hibou, un ibis, et je m'étonne de trouver ces emblèmes sous cette tente. J'en fais la réflexion à mon chef, il ne me répond pas. Je lui renouvelle ma question. Alors il me dit que les oreilles blanches, les visages pâles, comme ils nous appellent, ne peuvent pas savoir ce que je lui demande, qu'il n'a pas le droit de répondre à mes questions qui sont indiscrètes et touchent à l'origine de sa race. Mais moins il voulait parler, plus je voulais savoir, je ne suis pas femme pour rien. Alors, je me fis si gentille, je lui promis des perles de verroterie de nuances si diverses, des chapeaux à haute forme tout à fait inédits, du whisky comme il n'en a jamais bu, que tout chef indien qu'il soit, il finit par se laisser séduire et me fit un récit qui tend à prouver que les premiers habitants, les premiers possesseurs du sol américain, ne seraient pas autre chose qu'une partie des soldats de l'armée de Pharaon. Ce serait la plus forte et la plus robuste portion de cette armée qui, franchissant d'abord l'Arabie Pétrée, en se dirigeant au nord de la Perse, de l'Afghanistan, aurait gagné les hautes montagnes du Tibet, où elle aurait fait un long séjour. De là, traversant la Mongolie et la Sibérie, elle eut atteint les monts Stanovoï qu'elle eut longés, le cercle polaire du Nord, puis le détroit de Behring. Puis enfin, elle serait arrivée au pays des Esquimaux, après avoir traversé le territoire d'Alaska et les dernières déclivités septentrionales des montagnes Rocheuses. Et tels seraient les premiers habitants de l'Amérique. Bien entendu, je laisse à mon chef indien toute la responsabilité de son affirmation. Cependant, je crois que personne ne sait exactement quels ont été les premiers possesseurs de l'Amérique.

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LA FIN DE LEUR SÉJOUR AUX ETATS-UNIS[]

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Les malheureux colis de New-York[]

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La découpe d’un bison n'est pas possible par une femme seule, surtout de petite taille.

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Neige à Simon Canyon, sur le fleuve San Juan, au nord-ouest du Nouveau-Mexique. Faire la lessive dans de l'eau gelée doit être très pénible.

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Leur caniche boit son verre de vin pour fêter l'arrivée des colis.

Jeanne et son mari n’achètent pas dans les rares magasins locaux et tardent à aller se fournir à Durango. Enfin ils se décident et ont une bonne surprise :

Mais les jours s'écoulent, Mesdames, Messieurs, et nous sommes toujours sans nouvelles de nos malheureux colis de New-York. Nous savons simplement que, prenant une fausse direction, ils sont allés à Council-Bluffs, à 300 lieues de l'endroit où nous sommes. Nous avons fait un procès aux Compagnies, des réclamations quotidiennes, mais tout cela ne remédie pas à notre misère, qui s'aggrave chaque jour.
Pour comble d'infortune, ma boîte de pharmacie a suivi le sort commun, elle est à Council-Bluffs avec les objets égarés, et mes deux hommes sont tombés malades. L'un d'eux, ayant voulu, malgré ma défense, se baigner dans le San Juan, sous prétexte qu'il avait trop chaud, a des fièvres violentes, l'autre, épuisé sans doute par notre régime alimentaire, a eu une dysenterie grave. Et que faire ? Je ne puis pourtant pas les laisser mourir, et je n'ai pas un seul médicament ! Un peu docteur par naissance, mon père était médecin, très audacieuse par tempérament, je tente l'impossible, je fais à mon dysentérique des cataplasmes avec de la sciure de bois. et je le guéris radicalement. Je vous recommande à tous cette méthode nouvelle. Mais pendant que mes deux hommes sont malades, j'hérite forcément de leur besogne je vais dans les champs ramasser le bois dont nous avons besoin; je vais au San Juan lui demander son eau de laquelle, si sale quelle soit, nous ne pouvons pas nous passer, et je dépèce les bisons que nous tuons à coups de revolver, pour nous nourrir, chaque fois que nous en trouvons l'occasion. Je suis devenue une bouchère émérite, je connais à merveille les meilleures places que j'enlève très prestement, car ce grand soleil qui est toujours là-haut fait corrompre la viande très peu d'heures après que la bête est abattue. Je suis devenue aussi, forcément, notre blanchisseuse à tous, et le métier est très rude, à mesure que la saison s'avance, tant les nuits sont froides. Si le matin, de bonne heure, je vais au San Juan pour laver mon linge, je me trouve dans cette très cruelle alternative ; j'attrape à la fois une onglée terrible aux doigts, grâce aux gros glaçons que charrie la rivière et en même temps de violents coups de soleil aux bras, grâce à ce dévorant soleil qui est toujours là-haut. Voyez ma situation : je voudrais absolument réchauffer mes pauvres doigts, mais je voudrais tout autant rafraîchir mes malheureux bras ! A bout de patience, nous nous décidons à retourner à Durango, à la recherche de nos colis. Je dois vous dire qu'ils nous sont arrivés quinze jours avant notre départ et, excusez-nous, en retrouvant notre bordeaux, je crois vraiment que nous nous sommes tous un peu grisés. Jusqu'à mon caniche qui a bu son verre de vin !

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Deux amis archéologues[]

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Durango en 1890.

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Locomotive dans les Black Hills, 1890. Ce train va de Durango Colorado à Silverton.

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Archéologues.

Goussard de Mayolle et sa femme sympathisent avec deux ingénieurs américains :

A Durango, nous faisons la connaissance de deux ingénieurs américains, MM. Morgan Draper et Taylor, qui tous deux viennent au Nouveau-Mexique pour le compte d'une grosse Société archéologique, qui pense que dans les ruines d'Aztèques qui sont au Nouveau-Mexique, ruines qui datent de mille ans, on doit retrouver parmi les morts des amphores et des plats qui auraient été enterrés avec les Aztèques qui avaient, paraît-il, la religion des Égyptiens. Je n'ai su ces détails que beaucoup plus tard, car mes ingénieurs se montrent très discrets sur leur mission, mais l'un deux, Morgan Draper, parle français, aime et connaît la France, et vous comprendrez tous comment si loin d'elle, nous sommes venus à cet inconnu les mains chaudement tendues, comme s'il eut été un ami. Ni lui ni son camarade ne connaissent le Nouveau-Mexique. Ils nous demandent des renseignements que nous leur donnons bien volontiers ; nous leur offrons de revenir avec nous à Bloomfield, de leur céder un coin de notre hutte, de partager avec eux le peu de provisions que nous avons et nous voilà tous repartis pour Bloomfield, avec les 13 hommes, les 13 Mexicains qu'ils ont loué pour leurs fouilles. Je dois dire bien sincèrement que ce n'est pas seulement la charité chrétienne ni uniquement le patriotisme qui m'avaient fait agir, mais il y avait longtemps déjà que ces ruines énigmatiques du Nouveau-Mexique m'intriguaient fort, et quand j'ai su que c'étaient des vestiges de villes datant de mille ans, je n'ai plus eu qu'un seul désir, suivre mes ingénieurs dans leurs fouilles. On n'a aucune donnée précise sur l'importance de ces villes. On ne sait pas même comment elles ont pu être édifiées, puisqu'il n'y a pas de pierres dans le pays. On pense que les Aztèques allaient aux Rocheuses leur demander les matériaux dont ils avaient besoin et qu'ils faisaient descendre tout ce qui leur était nécessaire, arbres, bois, pierres, par ces immenses arroyos, ces larges rivières aujourd'hui taries qui paraissent vraiment être nées pour eux et mortes en même temps qu'eux.

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Les fouilles[]

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Sites Majeurs.

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Habitations troglodytiques à Mesa Verde.

Oubliant complètement le but de leur voyage, la prospection minière, ils font des fouilles dans un cimetière indien :

Nous voici donc tous en chasse d'un cimetière d'Aztèques. Nous trouvons d'abord un pan de murailles, puis une grosse tour, puis une autre grosse tour, puis enfin une enceinte encore entourée de murs. Ce doit être un cimetière. Et nous fouillons. C'est bien un cimetière, nous ne nous sommes pas trompés. Les tombes y sont nombreuses, longues, rapprochées; les morts y ont plutôt physionomie de momies que de squelettes et cependant, pas une seule bandelette. L'ossature est très complète, supporte à merveille le contact de l'air, mais indique, sans conteste possible, une race de haute taille et pourtant on nous dit que les Aztèques étaient petits. Voulant conserver un souvenir de ces inconnus, je crains d'avoir commis un bien grand sacrilège : j'ai ramassé l'os du tibia d'un de ces géants qui m'est devenu superbe coupe-papier. Mais depuis, prise d'un grand remords, je demande à Dieu, chaque matin de m'épargner la honte, au dernier jugement, de retrouver mon pauvre Aztèque avec une béquille ! Chaque mort est enterré, en effet, avec une amphore et deux plats de dimensions diverses. Les anses des amphores ont une grâce et une fragilité remarquable. Tous ces plats ont conservé une stupéfiante fraîcheur de coloris. Ils sont gris et bleus, gris et verts, gris et rouges, verts et rouges, verts et bleus et chaque ciselure, chaque guillochure en a été faite à coups d'ongle. Ce minuscule détail me jette dans un profond désarroi. L'histoire m'enseigne que les premiers habitants du Mexique étaient les Aztèques, qu'ils étaient très avancés dans la civilisation, qu'ils connaissaient tous les arts, surtout celui de la poterie qui était leur art de prédilection et cependant, j'ai là sous les yeux des objets qui appartiennent à un peuple, qui ont été faits et laissés par un peuple qui probablement ne devait pas connaître les outils, puisqu'il se servait du bout de ses doigts pour embellir et enjoliver ses poteries.
Ne sont-ce donc pas les Aztèques ?
Serais-je en face des Cliff-Dwellings, habitants des rochers, ces êtres bizarres, indéchiffrables, qu'on a dû appeler Cliff-Dwellers, habitants des rochers, en désespoir de cause, parce qu'il était littéralement impossible de savoir ni leur nom ni leur origine véritable ? Ces êtres extraordinaires vivaient dans les cavernes les plus profondes ou sur les rochers les plus escarpés. Ils grimpaient sur leurs rochers comme des singes, comme de véritables rats, s'aidant Uniquement de bâtons ferrés du bout. Et on se demande de quoi ils pouvaient vivre sur leurs rochers. Il n'y avait ni élevage, ni culture possibles, puisqu'ils étaient installés sur du roc et entourés seulement de roc. Tous ceux qui visiteront le Nouveau-Mexique seront frappés du nombre de débris de poterie qui jonchent le sol, aussi bien autour des demeures d'Aztèques que des demeures des Cliffs-Dwellers. On raconte que les Cliffs-Dwellers, affolés par l'arrivée des Apaches, auraient brisé leurs poteries qu'ils aimaient avec passion, dans la crainte qu'elles ne tombassent aux mains d'un ennemi détesté ! Mais on peut faire de la fantaisie et de l'imagination tant qu'on voudra, personne ne sait rien de sérieux. On raconte également que les Cliffs-Dwellers adoraient le soleil et que chacun de leurs nouveau-nés était exposé, tout nu, pendant la première journée de sa naissance à ce grand et dévorant soleil.

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Combat contre les Apaches[]

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Les Goussard et leurs amis archéologues sont attaqués par des Apaches.

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Le chef apache Victorio.

Mon arrière-grand-tante est attaquée par une bande d'Apaches :

Je viens, Mesdames, Messieurs, de nommer les Apaches. Ils constituent la tribu la plus redoutée et la plus redoutable de toute la contrée. Nos devoirs et nos curiosités miniers nous ont fait la rencontrer et nous avons dû soutenir contre elle une véritable bataille. Nous marchions à cheval dans le lit du torrent quand tout à coup nous entendons un bruit de piétinement de chevaux. Des chevaux dans ce désert, ce sont ceux des Apaches. Nous descendons des nôtres, nous armons nos carabines, nous nous agenouillons derrière une roche et nous attendons. Bientôt nous voyons apparaître un premier Apache, puis un autre, puis un autre encore et, comme ils ne nous ont pas encore vus, ils marchent silencieusement ; mais dès qu'ils nous aperçoivent, ils poussent un rugissement terrible qui doit être un cri de guerre ou de ralliement et se précipitent de notre côté, essayant de nous blesser de leurs flèches. Bien entendu nous répondons avec nos carabines; mais la lutte se prolonge, nos carabines se vident, à un moment donné nous n'avons plus à notre disposition que nos couteaux et nos revolvers. Au commandement de l'un de nous, nous tirons tous ensemble nos revolvers et enfin nous restons les maîtres. Quand même, c'est une bien cruelle chose, une bataille, malgré le succès ! Les plus hauts sommets du Nouveau-Mexique, à l'ouest du Rio Grande, sont infestés par cette puissante tribu des Apaches. A proprement parler ils n'ont pas de lieu fixe d'habitation, mais ils circulent dans de larges portions du Nouveau-Mexique, par petites bandes, en quête de leur subsistance. Ils tombent à bras raccourcis sur de pauvres voyageurs sans défense ou en petit nombre et les laissent scalpés, mourants, après leur avoir enlevé tout vêtement et toute provision. Ils sont d'ailleurs en guerre constante avec les blancs, et dernièrement encore, une de leur bande, sous leur chef Victorio, infestait de nouveau les confins du Colorado et du Nouveau-Mexique. La plus grande partie de leur histoire est restée dans une obscurité profonde. Il n'y a guère que trente ou quarante ans qu'on sait à peu près leur genre de vie et leur lieu relatif d'habitation. Cependant, étant donné la vénération qu'ils professent encore pour le nom de Montézuma, il est probable qu'ils ont dû faire partie de son vaste empire et atteindre un certain degré de civilisation. Les chefs Apaches peuvent avoir autant de femmes qu'ils le veulent, mais une seule favorite. En général, ils choisissent leurs femmes dans d'autres tribus que la leur. Les femmes suivent les hommes dans leurs expéditions et, pour cette occasion, elles se couvrent le visage de rouge ou de noir, quelquefois des deux. Les hommes, heureusement, n'emploient que le rouge. Le chef Apache est extrêmement jaloux de ses femmes. La femme infidèle est mutilée de cruelle façon : on lui arrache le nez.

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Assassinat de leur ami Taylor[]

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Jeanne Goussard de Mayolle et son mari découvrant le corps d'un de leurs amis archéologues, tué par de ses peones mexicains.

Alors qu'ils préparent leur retour un crime odieux est perpétré :

Notre dernière semaine a été un grand deuil.
Notre pauvre ami, l'ingénieur Taylor, a été lâchement assassiné par un de nos hommes, un des Mexicains qui nous aidaient aux fouilles !
Mais enfin l'heure du départ est venue; nous rentrons en France, pour dire bien haut avec Coppée : Le meilleur du voyage est encore le retour.

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LE PROCÈS AVEC SA SŒUR (1896)[]

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Tribunal de Tours.

Le clerc-de rambaud marguerite

Sa fille aînée, Marguerite de Rambaud, épouse d'un polytechnicien.

DE RAMBAUD ERNEST 1

Ernest de Rambaud, colonel polytechnicien.

Maurice le clerc

Le fils de Frédéric Leclerc, Maurice.

Château Hauteville

Le château de La Hauteville où Ernest de Rambaud décède.

Comme ma trisaïeule et son mari Ernest de Rambaud semblent avoir été très privilégiés au niveau héritage, il y a procès entre les époux Goussard de Mayolles et les époux de Rambaud :

Une dame veuve Le Clerc est décédée à Tours le 25 févr. 1894, laissant pour héritiers ses trois enfants : la dame Goussard de Mayolles, née Jeanne Le Clerc, la dame de Rambaud, née Marguerite Eugénie Le Clerc, et le sieur Marc André Le Clerc. Aux termes de son testament reçu par Me Girault, notaire à Bourgueil, le 27 juill. 1892, elle avait disposé de toute la quotité disponible de ses biens au profit exclusif de la dame de Rambaud. Lors de l'inventaire, on trouva au domicile de la défunte divers papiers et documents et notamment une nombreuse correspondance qui par ordonnance de M. le président du tribunal civil de Tours, fut confiée à Me Bréchet nommé séquestre à cet effet.
Les époux Goussard de Mayolles, se proposant d'intenter contre la dame de Rambaud une action en captation et nullité du testament et voulant puiser des éléments de preuve dans la correspondance, ont, en novembre 1895, assigné devant le tribunal civil de Tours, les époux de Rambaud, le sieur Le Clerc et le sieur Bréchet es qualité, pour faire ordonner que (avant le partage ou la licitation des papiers de la succession qu'ils demandaient aussi par leur exploit introductif), les pièces et documents qui se trouvaient entre les mains de Bréchet, séquestre, seraient pendant trois mois déposés au greffe du tribunal où les parties pourraient en prendre communication soit par elles-mêmes, soit par leurs conseils, et y faire tels relevés qui leur paraîtraient utiles ou si mieux semblait au tribunal, entre les mains du notaire liquidateur et dans les mêmes conditions.

Le tribunal civil de Tours rend, à la date du 12 février 1896, le jugement suivant :

Attendu que les époux Goussard de Mayolles se proposant d'intenter contre les époux de Rambaud une action en captation et nullité du testament authentique de la dame veuve Le Clerc, demandent à être autorisés à prendre connaissance des lettres très nombreuses trouvés dans la succession;
— Qu'ils prétendent trouver dans ces documents la preuve de la captation qu'ils entendent faire juger par le tribunal;
— Attendu que les époux de Rambaud défendeurs ne contestent pas le droit de copropriétaire que la dame Goussard de Mayolles peut avoir dans les lettres objet du litige;
— Attendu que de son côté Duclaud, signataire de certaines de ces lettres, est intervenu dans l'instance; — Que la demande, régulière du reste en forme, n'est contestée par aucune des parties en cause;
— Attendu enfin qu'André Le Clerc, l'un des cohéritiers, a déclaré s'en rapporter à la justice dans toutes ces demandes;
— Attendu en outre, que les époux de Rambaud ont formé une demande reconventionnelle ayant pour but de faire restituer à la succession des lettres que la dame Goussard de Mayolles aurait en sa possession;
— Qu'il résulte, en effet, des conclusions signifiées par la demanderesse qu'elle possède des lettres adressées par la dame de Rambaud à la dame veuve Le Clerc sa mère;
— Que le principe de la copropriété des lettres trouvées dans la succession étant admis par toutes les parties en cause, celles que la cohéritière, la dame Goussard de Mayolles, peut posséder pour une cause quelconque, doivent faire retour à la succession ;
— Quelles doivent donc faire l'objet de l'examen du tribunal en même temps que celles confiées a Bréchet par ordonnance du président de ce siège en date du 5 mai 1894, Enregistrée ;
— Attendu que, par suite de ce qui précède, le tribunal n'a plus qu'à statuer sur le moyen à employer pour distinguer les lettres ayant un caractère purement confidentiel, celles qui n'ont aucune utilité pour l'appréciation de la demande principale et celles au contraire qui peuvent servir à la soutenir ou à y défendre ;
— Qu'en présence de la grande quantité de lettres objet du litige, il y a lieu d'en confier l'examen à des experts qui auront pour mission de les cataloguer, pour ainsi dire, comme il est dit ci-dessus ;

Par ces motifs :

— Reçoit Duclaud intervenant dans l'instance;
— Nomme MM. Gizors Gorce et Bréchet experts, lesquels devront prêter serment entre les mains du président de ce siège ou entre celles du magistrat qui, en cas d'empêchement, le remplacera;
— Dit que ces experts se feront remettre toute la correspondance trouvée au domicile de la dame Le Clerc, de cujus, et actuellement entre les mains de l'un d'entre eux, M. Bréchet, et ce dans le délai de huit jours ;
— Leur donne pour mission d'examiner toute cette correspondance, d'en extraire toutes les lettres ou parties de lettres pouvant servir soit à soutenir une action en captation de testament, soit à y défendre ;
— Dit que si dans certaines de ces lettres, ils rencontrent des passages d'un ordre particulièrement confidentiel ou secret, ils devront en extraire seulement les parties pouvant servira l'appréciation de l'instance pour laquelle elles sont réclamées;
— Dit que dans le cas où certaines de ces lettres ou passages de ces lettres leur paraîtraient d'une appréciation difficile ou douteuse, ou en cas de désaccord entre eux, ces lettres, cause de la difficulté, seront déposées au greffe et remises au tribunal qui les appréciera en chambre du conseil ;
— Dit encore que le surplus des lettres, ou encore celles qu'ils jugeront inutiles, seront par eux confiées à l'un d'entre eux pour être ensuite statué sur leur sort par le tribunal;
— Dit qu'en cas d'empêchement des experts ou de l'un d'eux seulement, il sera pourvu à leur remplacement par ordonnance du président ou du magistrat qui le remplacera rendue sur simple requête à qui présentée à cet effet par l'avoué de la partie la plus diligente, etc.

Appel principal par les époux Goussard de Mayolles, et appel incident par les époux de Rambaud et Duclaud.

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Arrêt de la Cour[]

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Du fait de ce procès ils ne figurent pas sur la première page du faire-part de décès d'Ernest de Rambaud.

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Malgré ce procès leurs noms figurent cependant en bonne place sur le faire-part de décès d'Ernest de Rambaud le 25 février 1899.

— En ce qui touche la demande de remise par a dame de Rambaud et par Duclaud des lettres qu'ils ont décrites à la dame Le Clerc, ayant un caractère confidentiel : Attendu que les époux Goussard de Mayolles soutiennent e ces lettres font partie de la succession de la dame Le Clerc et que la dame Goussard de Mayolles en a la copropriété en tant qu'héritière de sa mère pour un tiers; que cette prétention est mal fondée ; qu'il résulte des principes généraux du droit que le destinataire d'une lettre confidentielle n'en est pas maître absolu, qu'il ne peut en faire usage contre le gré de celui qui l'a écrite, à moins qu'elle ne forme titre à son profit ; qu'elle n'est sa propriété que sous la condition d'en respecter secret; qu'en cas de décès du destinataire, la lettre, qui ne peut être connue que de lui, doit, lorsqu'elle n'a pas été détruite, être remise à celui qui l'a écrite, conformément à l'intention commune de l'expéditeur et du destinataire, cette mise étant le seul moyen de respecter la condition du secret sous laquelle la lettre a été envoyée;
— Attendu que les premiers juges ont chargé des experts d'examiner la correspondance trouvée au domicile de la dame Le Clerc, d'en extraire toutes les lettres ou parties de lettres pouvant servir, soit à tenir une action en captation de testament, soit à y défendre, et à laisser de côté les passages, particulièrement confidents ou secrets;
— Attendu qu'il n'a été formé par aucun des héritiers de la dame Le Clerc une action en captation de testament : qu'un tribunal ne peut ordonner des mesures d'inclusion en vue d'une instance éventuelle; qu'il n'est saisi litige que par une demande qui précise son objet ;
— Que d'un autre côté, il est dès à présent constant que dès lettres confidentielles ont été adressées à la dame Le Clerc par la Dame de Rambaud et par Duclaud ; que leur action est justifiée principe; que pour déterminer celles de ces lettres qui sont confidentielles, il y a lieu, par suite de leur nature partielle, à une instruction spéciale; qu'il convient de les faire oser en la chambre du conseil où la cour verra quelles sont celles qui devront été remises aux demandeurs ; qu'on ne saurait prétendre avec raison que cette mesure est contraire aux règles de la publicité des débats et de la liberté de la défense; qu en effet, les lettres litigieuses ayant été envoyées à la dame

Le Clerc sous la condition tacite de n'être communiquées par elle à personne, il s'ensuit que cette condition serait violée par leur communication, faite aux parties en cause;

— Qu'il n'y a à faire aucune exception pour les lettres prétendues injurieuses; que s'il s'en rencontre parmi celles qui ont été adressées par la dame de Rambaud et par Duclaud à la dame Le Clerc, elles sont protégées contre toute révélation par leur caractère confidentiel; qu'il n'en est autrement que lorsque ces lettres sont injurieuses pour le destinataire lui-même ou pour des tiers, quand elles n'ont été déguisées sous le voile du secret que pour être en réalité communiquées;

En ce qui concerne les lettres non confidentielles :

— Attendu qu'il doit être donné acte à la dame Goussard de Mayolles de ce que la dame de Rambaud a offert devant le tribunal de laisser à sa disposition toutes les lettres par elle adressées à la dame Le Clerc qui n'étaient pas confidentielles ;
— Que le tribunal a omis de statuer sur ce point, des conclusions ayant été prises à cet égard à l'audience et régulièrement signifiées;

Sur la remise des lettres que détiendrait la dame de Mayolles :

— Attendu que les premiers juges ont condamné sous une astreinte pénale la dame de Mayolles à remettre aux experts dans la huitaine du jugement, les lettres de la dame Rambaud et de Duclaud qu'elle avait reconnu avoir en sa possession ; mais que cette reconnaissance ne résulte pas formellement des conclusions de première instance de cette dame; qu'elle affirme devant la cour n'avoir en sa possession aucune des lettres visées au jugement et que les extraits qu'elle en a faits ont été pris sur des copies de ces lettres fournies par un tiers; que le contraire n'est pas établi; Par ces motifs, donne acte à la dame Goussard de Mayolles de l'offre faite par la dame Rambaud de laisser à sa disposition toutes celles de ses lettres adressées à la dame Le Clerc qui n'ont pas un caractère confidentiel;
— Dit que les lettres confidentielles écrites par la dame de Rambaud et par Duclaud à la dame Le Clerc ne sont pas la copropriété des héritiers; qu'elles doivent être remises à la dame de Rambaud et à Duclaud, sans préliminaire d'expertise, ni communication et sans exception pour les lettres prétendues injurieuses, après examen en la chambre du conseil;
— Qu'il n'est pas établi que la dame Goussard de Mayolles ait eu en sa possession des lettres écrites à la dame Le Clerc par la dame de Rambaud et par Duclaud ; la décharge de la condamnation prononcée contre elle à cet égard;
— Dit que les lettres non confidentielles seront remises en l'étude du notaire liquidateur et qu'il sera statué par la liquidation sur leur attribution en même temps que sur celle des autres papiers de la succession;
— Ordonne que les lettres écrites par la dame de Rambaud et par Duclaud à la dame Le Clerc soient, sur le vu d'un simple extrait du présent arrêt notifié par la partie la plus diligente, envoyées par le séquestre Bréchet au greffe de la cour d'appel d'Orléans pour être déposées en la chambre du conseil de cette cour;
— Dit qu'elle déterminera les lettres ayant un caractère confidentiel et qu'un arrêt subséquent indiquera celles de ces lettres qui devront être remises à la dame de Rambaud et à Duclaud;

Infirme le jugement déféré à la cour en ce qu'il a statué autrement. Du 29 juill. 1896. C. d'Orléans. MM. Dubec, Drioux, subst. Morel (du barreau de Paris) et Houssard (du barreau de Tours)[28].

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NOTES ET RÉFÉRENCES[]

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  1. Annuaire des anciens élèves de l'École Centrale (1832-1888)
  2. Fascination and Misgivings: The United States in French Opinion, 1870-1914, Jacques Portes, Claude Fohlen, Elborg Forster, Cambridge University Press, 2006.
  3. A Parisienne in Chicago: Impressions of the World's Columbian Exposition, Madame Léon Grandin, Mary Beth Raycraft, University of Illinois Press, 2010.
  4. Recreation, travel, and leisure of the Southwest: a partial descriptive list of special collections at the Center.
  5. Recreation, travel, and leisure of the Southwest: a partial descriptive list of special collections at the Center.
  6. Mémoires de la Société archéologique de Touraine, 1866, v. 18.
  7. Annuaire des anciens élèves de l'École Centrale (1832-1888)
  8. [http://academie-de-touraine.com/Tome_22_files/124_013-032.pdf Aspects de la vie musicale tourangelle dans la première moitié du XIXe siècle, Jean Jude.]
  9. Ferme puis ferme expérimentale
  10. Ferme puis ferme expérimentale
  11. Ferme puis ferme expérimentale
  12. Ferme puis ferme expérimentale
  13. Ferme puis ferme expérimentale
  14. Aspects de la vie musicale tourangelle dans la première moitié du XIXe siècle, Jean Jude.
  15. Argentinien, A.N. Schuster, Рипол Классик
  16. Bulletin des séances de la Société royale et centrale d'agriculture : compte rendu mensuel.
  17. John Tyler sera, après son mandat présidentiel, élu au Congrès de la Confédération (les États qui font sécession).
  18. Polk's Medical Register and Directory of the United States and Canada; R. L. Polk & Company, 1886.
  19. Monthly Weather Review, Volume 912, United States. Army. Signal Corps, United States. Weather Bureau, United States. Environmental Science Services Administration, United States. National Oceanic and Atmospheric Administration, American Meteorological Society, War Department, Office of the Chief Signal Officer, 1912.
  20. Climatological data. New Mexico, Volumes 18 à 23, National Oceanic and Atmospheric Administration, Environmental Data and Information Service, National Climatic Center, 1914.
  21. A Parisienne in Chicago: Impressions of the World's Columbian Exposition, Madame Léon Grandin, Mary Beth Raycraft, University of Illinois Press, 2010.
  22. Recreation, travel, and leisure of the Southwest: a partial descriptive list of special collections at the Center.
  23. Fascination and Misgivings: The United States in French Opinion, 1870-1914, Jacques Portes, Claude Fohlen, Elborg Forster, Cambridge University Press, 2006.
  24. Le roman des voyageuses françaises, 1800-1900, Volume 668 de Petite bibliothèque Payot, Françoise Lapeyre, Payot, 2007.
  25. Royal Asylum of St. Ann's Society ... Governors, Council, etc. (Report, etc. 1866, 1869.). Saint Ann's Society (LONDON). 1866.
  26. Brothers of Light, Brothers of Blood: The Penitentes of the Southwest, Marta Weigle, Ancient City Press, 1976.
  27. Le roman des voyageuses françaises, 1800-1900, Volume 668 de Petite bibliothèque Payot, Françoise Lapeyre, Payot, 2007.
  28. Dalloz, jurisprudence générale Bureau de la Jurisprudence générale.
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